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mécomptes[1] dans l’appréciation des effets du remaniement des tarifs a fait ajouter aux impôts une augmentation de près de 30 millions sur les tabacs. La guerre de Chine, dont il est peu probable que les frais soient intégralement payés par les Chinois, l’expédition de Syrie, l’augmentation d’effectif du corps d’occupation en Italie, l’extension croissante donnée aux armemens, les charges diverses qui résultent de l’annexion de Nice et de la Savoie venant augmenter le déficit, il sera impossible de ne pas recourir prochainement à de nouveaux impôts ou à un nouvel emprunt, peut-être aux emprunts et aux impôts simultanément. Si un emprunt a lieu, il devra coïncider avec l’émission des obligations pour les travaux des chemins de fer ou la faire ajourner.

Les budgets, comme la dette, ont suivi une rapide progression. Le règlement définitif des dépenses ordinaires a été de 1 milliard 452 millions pour 1847, — de 1 milliard 456 millions pour 1852. Les prévisions du budget de 1861 portent les dépenses ordinaires à 1 milliard 808 millions, chiffre qui sera certainement fort au-dessous de celui du règlement définitif. C’est beaucoup que de passer en huit ans de 1 milliard 456 millions à 1 milliard 808 millions, ce qui constitue une augmentation de 352 millions. Dans les dix-sept années écoulées de 1831 à 1847, le budget s’était élevé de 1 milliard 219 millions à 1 milliard 452 millions, soit de 233 millions seulement[2]. J’ajoute que, dans les sept exercices de 1852 à 1859, il n’a été dépensé en travaux publics extraordinaires que 508 millions, tandis que les sept derniers budgets de la monarchie y ont consacré 958 millions, soit, en moyenne annuelle, 65 millions de plus.

Un budget qui dépasse le budget de 1852 de 352 millions, — plus de 84 millions de rentes perpétuelles ajoutées à la dette publique,

  1. Les douanes seules comme le prouve le tableau inséré au Moniteur du 19 décembre 1860) accusent une diminution de 51 millions pour les onze premiers mois de 1860, diminution qui ne porte que sur six mois et demi, le nouveau tarif sur les sucres, les cafés, le coton, la laine, etc., n’étant appliqué que depuis le milieu de mai. Calculée pour un exercice entier, la diminution serait, y compris la perte sur le sucre indigène, de plus de 130 millions. L’exposé des motifs du budget de 1861 estimait l’effet total de la réduction des taxes à 88 millions, et ramenait la perte pour le trésor à 40 millions, par suite des plus-values ordinaires et normales, des droits de douane résultant du traité de commerce et de l’impôt sur les alcools : le tout évalué à 48 millions. Le mécompte serait donc d’environ 80 millions, ou de 50 millions seulement, grâce aux 30 millions à obtenir de l’augmentation, postérieure au budget, sur le prix de vente des tabacs. C’est par conséquent être bien près de la vérité que d’estimer à 50 millions le déficit qui doit affecter, pour les douanes et le sucre indigène seuls et malgré la plus-value sur les tabacs), les prévisions du budget de 1861.
  2. Les chiffres des budgets antérieurs sont pris dans le compte général de l’administration des finances pour 1859, et celui du budget de 1861 dans la loi votée par le corps législatif.