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se trouvent à peine quelques centimètres en plus ou en moins. Chez un homme ordinaire, comptant 1m 75 de haut, la longueur des bras, de l’articulation de l’épaule au bout des doigts, est d’environ 75 centimètres ; celle des jambes, de la saillie placée au-dessous des hanches jusqu’au talon, est d’environ 86 centimètres. Que l’on retranche ou qu’on ajoute par la pensée 10 ou 12 centimètres seulement, soit au membre supérieur, soit au membre inférieur, qui ne voit qu’il en résulterait une difformité réelle faite pour frapper au premier coup d’œil ? Et pourtant on n’aurait diminué ou augmenté ces membres, le premier que d’un septième, le second que d’un huitième environ. Du nègre au blanc, de l’Hindou à l’Européen, la différence est bien loin d’être aussi considérable, tandis que nous avons vu ces mêmes parties varier, toutes proportions gardées, du simple au double d’une race animale à l’autre. Ici encore les limites de variation se montrent donc bien plus étendues chez les animaux que chez l’homme.

Toute variation dans la taille et les proportions porte nécessairement sur le système osseux qui forme la charpente du corps ; mais le squelette peut encore être atteint, et jusque dans ses parties les plus centrales, de diverses autres manières. Toutes choses égales d’ailleurs, le tronc par exemple peut être, dans les mêmes espèces, ou plus long ou plus court, selon les races. D’ordinaire ces différences tiennent à l’allongement ou au raccourcissement des vertèbres, dont le nombre d’ailleurs reste fixe. Parfois aussi c’est ce nombre lui-même qui varie. Les cochons sont remarquables sous ce rapport. D’après Eyton, que cite M. Godron, il peut exister de treize à quinze vertèbres dorsales, de quatre à six vertèbres lombaires et sacrées. Ces variations sont bien plus étendues encore dans la queue, dont le squelette n’est autre chose qu’un prolongement de la colonne vertébrale ; on y compte, dit encore Eyton, de treize à vingt-trois osselets, et toutes ces différences sont héréditaires dans certaines races porcines de l’Angleterre. Déjà Frédéric Cuvier avait remarqué que la queue des chiens renferme de seize à vingt et une vertèbres. Au reste, cet appendice est un de ceux qui présentent dans plusieurs espèces domestiques les modifications les plus considérables. Chez les moutons, en particulier, comme nous l’apprennent Pallas et D. Low, tantôt la queue disparaît presque complètement dans certaines races persanes, abyssiniennes, tartares ; tantôt au contraire elle s’allonge de manière à traîner jusqu’à terre, comme dans certains moutons de l’Ukraine, de la Podolie, du pays de Galles, etc. Habituellement elle est assez maigre ; mais on sait aussi qu’elle se charge parfois de loupes graisseuses énormes pesant, d’après Chardin, plus de trente livres, et nécessitant l’emploi d’un petit chariot