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districts métallurgiques de toute l’Allemagne. On ne peut demeurer quelque temps dans le Harz sans être touché de la bonté avec laquelle les employés de tout rang traitent les mineurs, et du respect affectueux que ceux-ci témoignent à leurs supérieurs.

La bienveillance des mœurs, les rapports presque paternels qui s’établissent entre maîtres et ouvriers, atténuent ce qu’il y a d’excessif dans la toute-puissance de l’état ; mais une autre raison contribue encore à faire accepter plus facilement cette souveraine autorité. Chacun sait en effet qu’elle ne s’exerce qu’en faveur de la population ouvrière du Harz. On ne se propose pas uniquement d’envoyer dans les caisses du Hanovre le riche produit des mines, on ne vise pas à de larges et rapides bénéfices ; le principal but qu’on poursuit, c’est de produire assez chaque année pour couvrir toutes les dépenses et pour fournir du travail à tous les habitans. Aussi l’exploitation n’avance-t-elle qu’avec prudence et lenteur. La richesse minérale des montagnes du Harz n’est pas illimitée : les filons sont à peu près parfaitement connus ; on sait jusqu’où ils s’étendent, et l’on en poursuit avec soin toutes les ramifications. Il y a toujours un certain ensemble méthodique de travaux tout préparé pour un grand nombre d’années. L’abatage, c’est-à-dire l’enlèvement des matières utiles, est assuré pour une période de cinquante ans. Les massifs qui renferment les métaux précieux sont découpés par un système convenable de galeries, et n’attendent que le pic et le fleuret du mineur. Une compagnie particulière voudrait récolter tout d’un coup cette riche moisson, un gouvernement besoigneux serait tenté d’en faire autant ; mais le gouvernement hanovrien a toujours considéré les richesses du Harz comme un trésor qu’il ne lui appartenait pas de gaspiller : il pourrait en tirer des revenus considérables en épuisant les mines, et il ne le fait pas. Je tiens du directeur des travaux du Harz qu’une mine nommée Hülfe Gottes, secours de Dieu (un grand nombre d’entre elles ont des noms aussi expressifs), qui donne aujourd’hui 200,000 francs de bénéfice annuel, pourrait très facilement rapporter un million. C’est ainsi qu’on ménage les ressources à l’aide desquelles le Harz peut subvenir à tous ses besoins. Cette province ne coûte absolument rien au trésor hanovrien. Le produit des usines métallurgiques sert à payer les fonctionnaires, suffit aux dépenses qu’entraînent la construction et la réparation des routes, l’entretien des usines, l’aménagement des immenses forêts qui fournissent le combustible et le bois de soutènement des mines. Une fois seulement l’on tenta de donner à l’exploitation des mines une impulsion assez vigoureuse pour obtenir des bénéfices considérables : ce fut pendant la période de l’occupation française, tandis que le Harz faisait partie de l’éphémère royaume de Westphalie ;