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les déterminent, nous avons constamment trouvé celle-ci : — entre les formes les plus éloignées, il règne des séries graduées ininterrompues qui les relient intimement et s’opposent à ce qu’on les sépare. — Eh bien ! quelle espèce animale présente dans ses races ce caractère au même degré que l’homme ? Aucune bien certainement. C’est là une vérité qui n’est pas niable, dont sera vite convaincu quiconque entrera quelque peu dans les détails de l’étude des races humaines. Même à ne procéder qu’à grands traits, à ne comparer que les deux extrêmes les plus éloignés, l’homme noir et l’homme blanc, pour ne pas sortir de l’Afrique, le fait est facile à vérifier. Nous savons aujourd’hui, nous apprenons chaque jour davantage que tous les nègres ne ressemblent pas aux populations du golfe de Guinée, si longtemps considérées comme représentant la race entière. À peine a-t-on franchi la zone littorale de la côte des Esclaves qu’on découvre des hommes à cheveux laineux, à peau noire, mais dont le type commence à s’éloigner de celui du Guinéen. Là même les traits deviennent parfois complètement européens. C’est au type grec que Bodwich compare ceux des nobles Ashantis. Les jeunes princes dahomans que nous avons vus en Europe avaient encore les lèvres un peu grosses et saillantes, mais par la hauteur et le développement du front, par la forme du nez, ils ne le cédaient à aucun Européen de la plus pure race. Au Congo à l’ouest, sur toute la côte de Mozambique à l’est, nous voyons les populations se rapprocher par les traits de nos populations d’Europe, au point que la nature des cheveux et la couleur du teint peuvent seules empêcher toute méprise. Ce dernier caractère s’affaiblit souvent sur les rives du Zambèze. Au cœur de l’Afrique. centrale, Livingstone a trouvé des populations dont le teint varie du brun foncé à l’olivâtre. Le même voyageur ajoute : « Bien que ces hommes, aient les lèvres épaisses et le nez épaté, la physionomie nègre ne se rencontre parmi eux que chez les êtres les plus dégradés. » Plus au sud se présentent toutes ces populations mêlées, qui conduisent, toujours insensiblement, du nègre soit aux Hottentots vers le Cap, spinaux blancs dans la Cafrerie. Et si nous traversons l’étroit canal de Mozambique, nous verrons ce même type nègre passer au Polynésien et au Malais.

Voilà quelques-uns des faits que présente l’Afrique méridionale, c’est-à-dire la contrée où la race nègre, enserrée entre les deux océans, livrée à elle-même aussi entièrement que possible, soumise à des influences assez constantes, est restée le plus à l’état stationnaire et a dû le moins varier… Si nous remontons au nord d’une ligne sinueuse s’étendant à peu près de l’embouchure, du Sénégal au lac Tchad et de celui-ci au point de la côte de Zanguebar coupé par l’équateur, les faits deviennent bien autrement frappans. Les races