Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 31.djvu/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mise en avant par l’empereur, qui, en invitant le chargé d’affaires de France, semble avoir porté un démenti à l’interprétation donnée à ma conduite… La Russie, quoi qu’on en dise, n’épouse pas les passions et les injustes préventions de son souverain.

« Le corps diplomatique est fort bien pour moi ; il apprécie ma position avec justesse et convenance. Si dans les premiers momens, malgré la réserve dont nous devions les uns et les autres envelopper notre pensée, j’ai cru remarquer parmi ses membres quelque dissidence d’opinion, je dois dire que tous aujourd’hui se montrent jaloux et soigneux de la dignité d’un de leurs collègues, et semblent approuver que je ne m’écarte pas de l’attitude que les circonstances m’imposent. »


« Le même au même.

« Saint-Pétersbourg, 19 janvier 1842.

« Monsieur,

« Il y a ce soir bal à la cour, où je suis invité et me rendrai avec Mme Périer. Ce bal a lieu tous les ans vers la fête du 6/18 janvier, jour des Rois et de la bénédiction de la Neva ; mais le corps diplomatique n’y est pas ordinairement invité. Il paraît qu’on a voulu cette fois faire une exception en raison de ce que le cercle du 1er janvier n’a pas été tenu. Il ne serait pas impossible aussi que le désir de donner à la légation française une prompte occasion de reparaître à la cour entrât pour quelque chose dans cette innovation. »


« Le même au même.

« Saint-Pétersbourg, 23 janvier 1842.

« Monsieur,

« Je ne puis aujourd’hui que confirmer ce que j’ai eu l’honneur de mander à votre excellence, dans ma précédente dépêche, de l’excellent effet que produisent l’attitude du gouvernement du roi, l’indifférence avec laquelle il a accueilli l’absence de M. de Kisselef lors de la réception du 1er janvier, et la ligne de conduite dans laquelle il m’a été ordonné de me renfermer ici…

« Au dernier bal, qui n’était point précédé d’un cercle, l’empereur et l’impératrice ont trouvé, dans le courant de la soirée, l’occasion, que je ne cherchais ni ne fuyais, de m’adresser la parole. Ils ont parlé l’un et l’autre, à plusieurs reprises, à Mme Casimir Périer. Enfin tout s’est passé fort convenablement et avec l’intention évidente de ne marquer aucune différence entre l’accueil que nous recevions et celui qui nous était fait naguère… »