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sement avec la race du pays sont très recherchées ; mais comme c’est surtout pour la production du beurre qu’on entretient des étables bien garnies, l’élève des bêtes de boucherie prend peu de développement, sauf dans la région du littoral. Cette regrettable lacune dans une culture en général si bien entendue provient en partie de la rareté des bons pâturages, en partie aussi de la faible consommation de viande faite par la classe ouvrière. Le nombre de têtes de la race bovine était en 1846 de 340,574 pour les deux Flandres, ce qui constituait un accroissement de 18 pour 100 depuis 1840. Si les étables flamandes sont bien entretenues, les porcheries au contraire laissent beaucoup à désirer. Cependant, comme la plupart des petits cultivateurs nourrissent un ou deux porcs très grands et très bien engraissés, le nombre de ces animaux est assez élevé, et leur produit en viande considérable. Le chiffre représentant la race porcine était de 140,000. En résumé, si l’on compare la quantité de bétail qu’on entretient en Flandre à celle qu’on trouve ailleurs, on constatera qu’aucun autre pays n’a l’avantage sous ce rapport. En effet, d’après M. de Lavergne, en 1846 on comptait en Angleterre, non compris l’Écosse et l’Irlande, 33 bêtes à cornes, 6 chevaux et 200 moutons par 100 hectares de superficie ; à la même époque, la statistique officielle a trouvé en Flandre sur une même étendue 55 bêtes à cornes, 12 chevaux et 8 moutons, ce qui donnerait, en réduisant les têtes de mouton en têtes de gros bétail dans la proportion de 8 à 1, 64 têtes pour l’Angleterre et 68 têtes pour les Flandres. Ce résultat est d’autant plus remarquable que, pour l’entretien du bétail, l’Angleterre a l’avantage énorme d’avoir la moitié de son territoire en prairies naturelles, qui n’occupent en Flandre que la sixième partie du sol.

En beaucoup de points, on le voit, il est permis de recommander l’agriculture flamande à l’attention et même à l’imitation des pays où la loi et les mœurs ont divisé le sol ou la culture. En effet, peu de nations ont l’avantage de posséder dans leur sein une classe de fermiers riches et éclairés disposés à confier à la terre des sommes considérables. Le gentleman farmer qui met en action toutes les forces productives du sol par l’application intelligente des procédés perfectionnés qu’indique la science est une exception sur le continent. En Angleterre même, on ne rencontre pas aussi souvent qu’on pourrait l’espérer ce type du cultivateur modèle. Le goût des occupations agricoles est encore partout trop peu développé pour qu’on puisse s’attendre à voir beaucoup de personnes aisées consacrer leur fortune, leur temps et leur intelligence à une industrie qui exige une extrême diligence, une certaine fermeté de caractère, et surtout les traditions de la vie rurale. L’exemple de la Flandre, où de petits cultiva-