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ne s’est élevé que de 5 pour 100. Le cultivateur est donc parvenu, à force de sacrifices et de travaux bien conduits, à doubler à peu près le produit net du sol, et pourtant il n’a joui que transitoirement de cette plus-value qu’il avait créée, et qui est allée grossir la rente. L’accroissement des fermages pèse sur la classe rurale d’autant plus lourdement qu’en Flandre la plus grande partie du sol est exploitée par des locataires.

Aussi loin qu’aient pu remonter les recherches, on a trouvé en vigueur dans le pays flamand un usage consacré par les anciennes coutumes écrites, et qui semblerait devoir donner quelque sécurité aux cultivateurs. C’est le droit du fermier qu’on appelle en flamand pachtersregt, tenant-right en anglais, et qui consiste dans l’obligation imposée au fermier entrant de payer au fermier sortant la valeur des pailles et des fumiers qui se trouvent sur la ferme, plus celle des engrais, arrière-engrais et récoltes en terre. Le pachtersregt varie du reste dans chacune des anciennes divisions du pays, et ces différences semblent même tenir aux diverses coutumes des tribus germaniques qui se sont primitivement partagé la contrée. C’est ainsi que du côté d’Ypres et de Courtray on ne paie que le tiers de la valeur des engrais qui ont déjà servi à produire une récolte, tandis que du côté de Gand on en paie la moitié, que dans le pays de Waes on donne même une indemnité fixe de 21 francs par hectare pour la fumure enterrée depuis deux ans. La somme totale de ces indemnités varie donc selon le bon état de culture des terres et selon l’époque de l’entrée en jouissance. Dans les cantons méridionaux, où les baux commencent au mois d’octobre, le pachtersregt, ne s’appliquant qu’à des engrais à moitié épuisés, à ceux qui se trouvent dans les citernes et dans le fumier, ne s’élève en moyenne qu’à 70 ou 80 francs l’hectare, tandis que du côté de Gand, où les fermiers prennent possession à la Noël ou au 1er  mars, l’indemnité à payer porte sur les récoltes en terre, sur les engrais et arrière-engrais, et monte quelquefois jusqu’à 400 et 500 fr. L’hectare emblavé. M. Caird, dans ses Lettres sur l’agriculture anglaise, ne se montre point favorable au tenant-right, qui, suivant lui, enlève au fermier entrant une partie de son capital disponible, donne lieu à des débats, à des fraudes incessantes, tout au moins à des évaluations coûteuses, et ne paraît point favoriser particulièrement le progrès agricole. En parcourant les comtés de Surrey et d’Essex, où l’inventory se fait sur les mêmes bases que la prisée flamande[1], et s’élève à peu près au même chiffre, de 1 à 2 livres sterling l’acre. M. Caird fut frappé du contraste qui existait entre l’aisance croissante des experts et la détresse des fermiers. En Flandre, on considère le pachtersregt

  1. On nomme ainsi en Flandre un inventaire des amendement non épuisés.