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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 novembre 1860.

Rien n’est changé, croyons-nous, dans les lignes caractéristiques de la situation générale de l’Europe dont nous tracions l’esquisse il y a deux semaines. Les incidens qui se sont accomplis depuis, le demi-jour qui a discrètement filtré sur les faits antérieurs, tout annonce que nous assistons bien à la fin d’un acte et non à un lever de rideau. Le trio mimé de Varsovie, si heureusement suivi du chœur retentissant du banquet du lord-maire, a marqué cette halte significative dans le grand drame européen. Voici que les personnages actifs de ces derniers temps quittent la scène et se reposent à leur façon. Le général Lamoricière prend congé, par un mâle et intéressant récit de la courte campagne des États-Romains. Garibaldi fait une sortie aussi originale et aussi brusque qu’avait été son entrée. Le roi Victor-Emmanuel se rassasie de suffrage universel à la napolitaine. Pour la France et l’Angleterre, l’entr’acte s’ouvre par une heureuse diversion, par la nouvelle de la commune victoire de Chine. On respire, on peut se lever et parler, aller et venir, faire des visites dans les loges et prendre un sorbet. Ceux que la pièce a importunés ou trop émus la croiraient volontiers terminée. Nous-mêmes, assistans bénévoles, nous ne demandons pas mieux que d’accepter cette péripétie comme un dénoûment tel quel, sans oublier qu’aussi bien les affaires humaines ne comportent point de dénoûmens complets et absolus, et que s’il est donné parfois aux spectateurs politiques de voir le commencement de la fin, il n’est pourtant pas de fin qui ne soit à son tour le commencement d’autre chose.

C’est au moins la paix assurée pour six mois, au dire de tout le monde ; nous espérons que c’est mieux encore, car qui peut prévoir le tour que prendront les événemens et les idées dans un intervalle de six mois ? Ainsi nous ne voulons pas nous offusquer de ce rendez-vous que les belliqueux.