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suivant leur espèce et suivant aussi les circonstances de leur production. L’école nouvelle ne prétend pas du reste que ces mêmes animaux qui naissent spontanément ne puissent se reproduire à la manière ordinaire, et les deux modes peuvent se succéder. Les vulgaires plaisanteries contre l’Académie et les académiciens ne sont point des raisons que nous voulions, que nous puissions donner. S’il est vrai que les naturalistes habitués à une théorie doivent être lents à l’abandonner, et que les opinions depuis plus longtemps conçues sont ordinairement les plus tenaces, il n’est pas moins vrai que les adversaires de la doctrine nouvelle sont au premier rang parmi les savans contemporains, et qu’ils ne doutent point sans avoir de sérieuses raisons de douter. Quoique l’autorité ne soit rien, nulle opinion n’a plus d’importance et ne doit avoir plus de poids. Aussi la question est-elle indécise. Leurs objections s’adressent surtout aux procédés de l’expérimentateur, quoiqu’on doive penser aussi que les opinions sur la théorie de Burdach et de M. Pouchet dépendent beaucoup des idées sur la vie et l’organisation, sur la matière organique et les minéraux.

Les premières difficultés, les plus sérieuses peut-être, viennent, disons-nous, des appareils employés, et sont surtout pratiques. M. Milne Edwards pense que, dans la plupart des tentatives de M. Pouchet, la chaleur de 100 degrés n’a pas été prolongée assez longtemps, et que toute la masse chauffée n’a peut-être pas été portée à une température uniforme ; on sait qu’alors l’équilibre est lent à s’établir et que la chaleur ne passe pas instantanément du bord au centre. L’expérience même eût-elle été assez longue, en devrait-on conclure que les germes préexistans aient perdu la faculté de se développer ? Cela non plus n’est pas tout à fait certain, et l’on peut citer des cas où une pareille température, agissant sur des substances sèches, ne les a pas rendues absolument impropres à la vie. Ce fait semble résulter du moins de quelques observations déjà anciennes de M. Chevreul et de l’exemple, cité par M. Payen, des sporules de l’oïdium aurantiacum, végétal qui se développe sur le pain moisi. Ces sporules ont pu être chauffés jusqu’à 120 degrés, sans perdre la propriété de reproduire un être semblable au végétal qui les avait fournis. L’objection du reste n’ébranle qu’une partie des expériences de M. Pouchet, et beaucoup d’entre elles restent inexplicables. Celles-là surtout ne sont pas atteintes où les infusions ont été mieux et plus longtemps chauffées, où la matière a été carbonisée, où l’air et l’eau artificiels ont été employés, où des espèces si variées ont apparu dans des vases placés dans des conditions analogues, où beaucoup d’infusoires sont nés dans l’air confiné, tandis qu’un petit nombre se montrait dans un appareil rempli de pous-