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I.

Lorsqu’une matière organique quelconque, végétale ou animale, du foin ou de la chair, est exposée au contact de l’air humide, chacun sait ce qui arrive. Elle se décompose, elle se putréfie, comme on dit, et bientôt des animaux d’abord microscopiques, puis un peu plus gros, d’abord très simples, puis plus compliqués, s’y agitent, y nagent et s’y reproduisent. Comment y sont-ils nés ? Y avait-il dans la matière employée des germes qui, trouvant des conditions favorables, se sont rapidement développés ? Ces germes ont-ils été apportés du dehors par l’air ou par l’eau, ou bien ces petits êtres ont-ils été formés par la décomposition seule et les combinaisons nouvelles de la matière organisée ?

Une question bien posée est, dit-on, à moitié résolue. Depuis Aristote, celle-ci est posée dans ces termes ; elle a eu des solutions bien diverses, et les travaux de M. Pouchet lui font assurément faire un grand pas, mais un grand pas en arrière. Depuis longtemps, on enseignait dans les écoles la nécessité des germes, et on citait des expériences où la matière organique qui n’en contenait aucun, arrosée d’une eau pure et en contact avec un air tamisé, nettoyé, débarrassé de toute substance étrangère, ne donnait naissance à aucune plante, à aucun animal. C’est donc l’air qui semblait le véhicule naturel, rapide, infatigable de ces germes qui se développent à chaque instant sous nos yeux. Ces grains arrondis qu’un rayon de soleil traversant une chambre obscure fait briller, que le moindre souffle agite, sont autant d’œufs ou de germes qui se développent dès qu’un milieu favorable se présente, dès qu’ils trouvent des substances nutritives à absorber, l’air et l’eau, sans lesquels la vie est impossible. De même que des êtres plus parfaits ne peuvent naître et se développer que dans le sein de la mère, de même ceux-ci se détruisent, périssent, s’ils ne rencontrent pas ces conditions bienfaisantes. Dans le cas contraire, ils se gonflent, s’organisent, se comportent comme des œufs véritables, éclosent bientôt comme dans les sables de l’Égypte les œufs d’autruche, chauffés par le soleil. Lorsque dans un jardin une plante apparaît, nous cherchons autour d’elle si un végétal semblable n’existe pas, et nous trouvons toujours dans le voisinage des graines mûres qui ont dû être apportées par le vent. Souvent ces trajets sont fort longs, et des plantes ont été transmises d’un continent à l’autre. La nature même a tellement usé de ce procédé qu’elle lui doit la conservation de certains arbres. Tout le monde connaît ces plantes qui, à la manière des animaux, sont les unes mâles, les autres femelles. Elles ne peu-