politiques d’Angleterre que de chercher à interpréter les lieux-communs ou les excentricités des journaux. Ce silence que commande le caractère suspensif de la situation actuelle, on a vu avec quel art lord Palmerston l’a observé à Leeds. Quelques mots de sympathie générale à l’adresse de l’Italie, où il n’était fait mention expresse ni d’un fait spécial ni d’un nom propre, et tout a été dit. Nous nous trompons, lord Palmerston a réellement parlé politique dans une des réunions auxquelles il a assisté. Le passage vraiment actuel du discours auquel nous faisons allusion est passé inaperçu pour la presse européenne. Un grand manufacturier, membre de la chambre des communes, M. Crossley, a fourni, par une plaisanterie d’une saveur toute locale, le thème dont lord Palmerston avait besoin pour se faire comprendre sans rien préciser. M. Crossley avait dit que le noble lord était plus fort en politique qu’en tissage. « Mon honorable ami M. Crossley, a repris lord Palmerston dans la péroraison d’un de ses discours de Leeds, m’a un peu rabaissé. (Rires.) Il croit que je peux réussir en politique, mais que je ferais un très mauvais tisserand. (Nouveaux rires.) Mon honorable ami a peut-être raison à un certain point de vue, car l’occupation d’un homme politique ne doit pas être de faire des tissus ; sa besogne est de les effiler. Il a toujours affaire au dehors avec quantité de gens qui ourdissent perpétuellement des trames, et s’il a quelque mérite, il s’efforcera de défaire ces trames et de réduire ces toiles d’araignées à leurs élémens primitifs. » Lord Palmerston s’est tu, et les tisserands de Leeds de rire aux éclats et d’applaudir bruyamment. Voilà ce qui peut s’appeler parler par signes, voilà un échantillon du chiffre au moyen duquel lord Palmerston et la nation anglaise correspondent pour le moment entre eux.
Quoi qu’il en soit, et quand il serait vrai que lord Palmerston a l’habitude de ne mettre la main dans des trames que pour les déchirer, on conviendra qu’il a réussi à donner à l’Angleterre cette position singulièrement favorable qui permet à un peuple de profiter des événemens sans s’y compromettre. La question active du moment, la question italienne, est en train de se résoudre de la façon qui convient le mieux à ses intérêts et plaît le plus à ses sympathies. Rome était le cauchemar séculaire de l’Angleterre protestante ; c’en est fait, ce semble, de la papauté temporelle. La dynastie de Naples était particulièrement odieuse à lord Palmerston, et voilà que lord Palmerston est débarrassé des Bourbons napolitains. L’unité de l’Italie est dans les convenances de la politique anglaise, qui dès 1814 donnait Gênes au Piémont pour nous susciter une barrière plus désagréable, et l’unité italienne se fait. Par un contraste bizarre, l’effet produit par les événemens italiens, si odieux aux cours du continent, augmente auprès de ces cours l’influence britannique. L’Angleterre était esseulée en Europe il y a un an ; aujourd’hui elle n’a que l’embarras du choix entre les alliances qui s’offrent à elle. Non-seulement la France, dans un document officiel émané de la source la plus élevée, s’est efforcée de démontrer la conformité de sa politique avec la politique anglaise sur les questions les plus importantes, mais