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d’une forte pression, il faut encore ranger celui que MM. Légé et Fleury-Pironnet, du Mans, ont récemment mis en pratique. Ce procédé consiste à faire passer d’abord un courant de vapeur d’eau dans le cylindre qui renferme le bois à injecter, de manière à entraîner les gaz et matières solubles qu’il contient, puis à effectuer le vide au moyen de la condensation de cette vapeur, enfin à introduire une dissolution de sulfate de cuivre sur laquelle on exerce, comme précédemment, une pression de dix atmosphères. L’opération dure deux heures trois quarts, pendant lesquelles on peut injecter deux cents traverses. Le prix de revient est de 10 francs environ par mètre cube de bois préparé. Ce système est employé depuis trop peu de temps encore, pour qu’on puisse en apprécier l’efficacité relative.

Le troisième mode de pénétration repose sur la substitution d’un liquide conservateur à la sève qui se trouve dans les bois verts. L’invention en est due à M. Le docteur Boucherie, de Bordeaux, et remonte à 1838. D’après le brevet pris à cette époque, l’injection devait s’opérer par la succion même des feuilles et par l’aspiration au moyen de laquelle l’arbre puise dans le sol les sucs dont il se nourrit. On sait en effet qu’il existe dans les plantes un mouvement analogue à celui de la circulation du sang chez les animaux. La sève, qui n’est d’abord que de l’eau absorbée par les racines, est l’agent mécanique de ce mouvement; elle pénètre dans toutes les parties du végétal; mise en contact avec l’atmosphère par l’intermédiaire des feuilles, elle absorbe une certaine quantité de carbone, se transforme en gomme, en cellulose, en fécule, et redescend vers les racines en formant entre l’écorce et le bois une nouvelle couche ligneuse. M. Boucherie imagina donc de substituer à l’eau pompée par les racines un liquide anti-septique, se servant de la végétation même pour le faire pénétrer jusqu’au cœur de l’arbre. Ce procédé, très simple en apparence, était d’une application trop difficile et trop dispendieuse pour être pratiqué sur une grande échelle; il fut abandonné pour celui qui est actuellement en usage, et qui consiste à expulser la sève au moyen de la pression même et de la filtration du liquide à injecter. A cet effet, la pièce de bois, coupée à la longueur voulue, mais encore recouverte de son écorce, est couchée sur un chantier; à l’une des extrémités est adaptée une enveloppe de toile imperméable qui communique, au moyen d’un tube en caoutchouc, avec un réservoir placé à dix mètres environ au-dessus du sol. La pression opérée, par suite de cette élévation, sur une section de la pièce de bois suffit pour en expulser la sève, qui s’écoule par la