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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 décembre 1860.

Les circulaires et les actes par lesquels M. de Persigny a signalé le début de son ministère marquent davantage la couleur du nouveau régime ouvert par le décret du 24 novembre. On nous rendra cette justice, que nous avons toujours bien auguré de l’influence que M. de Persigny peut exercer sur la politique du gouvernement. Même dans un camp qui ne serait point le nôtre, nous préférerions hautement l’homme qui aurait toujours été séparé de nous par de francs et nets dissentimens aux hommes qui nous présenteraient dans les adversaires embarrassés d’aujourd’hui les amis inconstans d’autrefois. M. de Persigny est un homme de foi : il l’a été pendant les mauvais jours de la cause qu’il a épousée, et, grâce à sa fidélité à lui-même, il n’a point de difficultés à démêler avec son passé. Il reste encore un homme de foi : aussi nourrit-il une ambition courageuse pour le régime à la fondation duquel il a tant travaillé. On le voit bien aux intentions qu’il annonce et au ton de son langage. Les préfets doivent avoir été surpris de l’accent de ses instructions. Les prédécesseurs de M. de Persigny ne les avaient pas accoutumés à cette attitude généreuse et confiante dans sa brusquerie ; empêtrés dans le statu quo, ils n’avaient point cette confiance en eux-mêmes, cette possession et cette fierté de l’idée servie par eux, la désinvolture en un mot, qui rendent très intéressante la manière de M. de Persigny. Tel que nous avons connu M. le ministre de l’intérieur, nous ne sommes point étonnés du ton d’estime qu’il a conservé à l’égard d’anciens adversaires, et des ménagemens qu’il demande aux préfets pour les opinions indépendantes. Sur ce point, il ne fait que payer une honorable dette de réciprocité, et nous avons particulièrement le droit de dire que sa politesse ne nous u point devancés.

Ce que nous aimons dans le langage des circulaires de M. de Persigny, c’est donc sa rondeur, c’est le contraste heureux qu’il offre sur le fond sec.