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un mouvement d’affaires qui n’est pas sans importance, tantôt sont convertis en tafias ou rhums par l’industrie des guildiviers[1]. En 1856, la quantité des sirops et mélasses était estimée à 13 millions de litres, celle des tafias à 8 millions 1/2. En distillant le vesou au lieu de la mélasse, on obtient un rhum qui rivalise avec celui de la Jamaïque.

Le café, moins ancien dans nos colonies que la canne, date du système de Law, dont il compensa les désastres par d’énormes bénéfices. Il fut encore une précieuse ressource en 1727, année où un tremblement de terre fit périr presque tous les cacaoyers. Pendant tout le XVIIIe siècle, les caféteries de la Martinique et de la Guadeloupe enrichirent leurs planteurs, et cette prospérité ne fut interrompue que par la révolution, qui conduisit les uns sur la terre étrangère, ruina les autres par le contre-coup des agitations de la métropole. Les ouragans, les maladies, l’épuisement du sol, l’ambition qui porte les petits habitans à monter au rang des sucriers, les avances qu’exigent des plantations qui ne commencent à être en rapport qu’au bout de cinq ans, portèrent le dernier coup à cette culture, qui menace de disparaître à la Martinique malgré une prime de 10 centimes par pied et par an, tandis qu’à la Guadeloupe elle résiste encore assez bien. Dans la première de ces îles, l’exportation en 1858 n’a été que de 17, 389 kilogrammes ; dans la seconde, elle a atteint 112, 415 kilogrammes, ce qui n’empêche pas le commerce français de qualifier de café de la Martinique tout l’approvisionnement qui vient de nos Antilles. Chaque pied en plein rapport produit une livre de fruits, chaque hectare 500 kilos.

Dans les denrées commerciales, le cacao tient le troisième rang. L’arbre n’entre en plein rapport qu’à sept ou huit ans, et un ouragan l’emporte en une heure, double inconvénient qui explique la moindre faveur qu’obtiennent les cultures arborescentes depuis que le sucre se place à des prix rémunérateurs. Le cacaoyer lutte cependant contre ces risques, surtout dans les terres sous le vent, où il s’allie avec les cultures de vivres. Pour régénérer les plantations, l’administration a demandé des plants au Venezuela, renommé pour la supériorité de ses cacaos. L’hectare rend en moyenne de 500 à 750 kilogrammes de fruits.

A la Guadeloupe, la faveur revient au coton, dont cette île alimentait, au dernier siècle déjà, les filatures de l’Alsace et de la Flandre. À la Grande-Terre, surtout à l’îlot de la Désirade, ce végétal trouve les conditions de terre profonde et légère, en même

  1. Le tafia est le produit, incolore et de médiocre qualité, de la distillation des mélasses ; le rhum est le même produit coloré et de qualité supérieure.