légitime que de faire prévaloir les idées éternelles de progrès et de justice sur l’expression de quelques coutumes particulières à une époque, l’exactitude morale sur la fidélité aux dates, et, comme le dit avec raison M. Eyriès, les formules « d’une convention, mais d’une convention trente fois séculaire, » sur la transcription littérale de la réalité contemporaine ? Non, quoi qu’on ait prétendu à ce propos, le parti pris par Simart dans la composition et le style des bas-reliefs du tombeau de l’empereur n’est ni un malencontreux caprice archéologique, ni un mensonge gratuit de l’artiste pour sortir d’embarras et dissimuler sa déconvenue en face d’une tâche toute nouvelle pour lui. C’est au contraire un choix judicieux, le résultat d’une appréciation sincère et raisonnée. Il faut louer celui qui a pris cette résolution d’avoir su ainsi sacrifier une véracité aride à l’éloquence, l’effigie matérielle à l’image, et les détails spéciaux, qui n’eussent mis. en lumière que quelques particularités de notre histoire, aux caractères plus généraux, à la signification tout humaine de l’ensemble.
Les dix bas-reliefs qui, avec la statue de l’empereur Napoléon, constituent la part faite à Simart dans la décoration de la crypte des Invalides n’ont pas été tous sculptés par lui. Il en est quelques-uns dont il a dû, faute de temps, confier l’exécution à des mains étrangères ; mais la disposition de toutes les parties de ce vaste travail lui appartient en propre, et si la critique court le risque de se méprendre parfois sur le nom du vrai coupable en relevant çà et là quelques inégalités dans la pratique, quelques imperfections dans le modelé de certains corps, elle est sûre du moins de s’adresser à qui de droit en louant partout l’élévation de la pensée et la justesse des intentions.
Pour relier entre eux les fragmens de l’épopée qu’il avait à écrire sur ces murs, pour imprimer à ces épisodes divers un caractère d’unité et de symétrie, Simart a eu l’heureuse idée de faire de la figure de l’empereur le centre invariable et comme le pivot de chaque composition. À droite et à gauche de cette figure, assise le plus souvent et exprimant par le calme de l’attitude et du geste la puissance sûre d’elle-même, l’auguste sérénité, du génie, des groupes d’hommes et de femmes, distribués dans un ordre régulier sans monotonie, symbolisent les grandes pensées que Napoléon médite ou les lois qu’il vient d’édicter. Ainsi, dans l'établissement de la cour des comptes, — sujet difficile et cependant un des plus heureusement traités, — la Fraude, l’Erreur et l’Imposture sont personnifiées par trois figures de femmes qui essaient en vain de s’approcher du trône impérial, tandis que, du côté opposé, l’Exactitude, la Vérité et l’Ordre s’abritent sous la main protectrice du souverain et à