pouvantée de l’attitude, il doit nous parler des souvenirs qui l’obsèdent et de l’horrible lutte qu’il vient de soutenir. On s’étonne vraiment que, pour retrouver quelque chose de la scène décrite par Eschyle, il faille remonter aux monumens de l’art antique, aux peintures des vases grecs, et que, depuis la renaissance jusqu’au siècle où nous sommes, tant de générations d’artistes aient pu, sans s’y arrêter, passer à côté d’un aussi grand sujet. Le choix fait par Simart avait donc en réalité toute l’importance d’une découverte. Reste à savoir le parti que le statuaire en a tiré, et dans quelle mesure les qualités de l’exécution correspondent ici à la puissance pathétique de la donnée.
Une première difficulté, et des plus graves, résultait de la violence même des agitations qu’il s’agissait de résumer. Une autre, non moins sérieuse, quoique toute matérielle, consistait dans l’ordonnance des lignes, dans l’accord à établir entre les différens aspects sous lesquels se présenterait cette figure, dont aucune draperie, ne vient soutenir les contours et en corriger au besoin l’insuffisance pittoresque ou les accidens. La sculpture répugne aux expressions convulsives, aux mouvemens désordonnés ; elle proscrit tout ce qui, de près ou de loin, tendrait à offenser la dignité de la forme, à en défigurer la beauté. Et cependant Oreste, succombant sous le poids des remords, ne pouvait, sans un contre-sens manifeste, revêtir l’apparence paisible d’un Endymion ou d’un Céphale. Ces transes, ces angoisses, d’une conscience en pleurs ne pouvaient être traduites à la façon des douleurs nonchalantes et des tristesses amoureuses d’un Narcisse. D’un autre côté, toute statue isolée d’un monument, et par conséquent accessible aux regards sous toutes ses faces, exige, dans la structure même et dans le geste, des combinaisons linéaires assez heureuses pour que l’unité des intentions et le charme de l’aspect subsistent, si variés que soient les points de vue. Or une figure couchée et défaillante offre en ce sens des ressources beaucoup moins certaines qu’une figure à représenter debout, parce que celle-ci, même sans le secours des draperies, se pondère naturellement et s’installe en vertu de son propre équilibre, et par le seul fait de son attitude verticale.
Cette double difficulté, inhérente au sujet aussi bien qu’aux conditions de l’agencement, Simart a su la vaincre avec une habileté rare et une intelligence supérieure des convenances de la statuaire. Rien dans son œuvre ne viole la loi morale de l’art antique, rien ne dépasse les limites au-delà desquelles l’intention dramatique aboutirait au désordre, l’énergie de l’expression à la déchéance de la forme ; rien non plus ne vient troubler ou appauvrir l’harmonie de la composition et introduire, soit dans les parties que l’œil embrasse pleinement développées, soit dans les parties vues en raccourci, un é