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d’eau des bateaux fins et légers ; l’hiver, ils patinent sur le champ de glace que forment ces lacs durcis. Les études portent, comme dans les autres écoles que nous avons déjà passées en revue, sur les diverses branches de l’art militaire, mais avec des nuances que détermine la différence des deux armes auxquelles se destinent les cadets de Sandhurst, la cavalerie et l’infanterie. Après un séjour d’environ deux années, les cadets qui ont fait leurs preuves à l’examen final obtiennent, sans l’acheter, une commission dans l’armée. Au point de vue économique, ces deux institutions, Woolwich et Sandhurst, se suffisent elles-mêmes sans coûter presque aucun sacrifice à l’état. Ce fait, qui n’avait nullement été prévu à l’origine, est la conséquence de deux mesures relativement récentes : le retrait graduel des subsides accordés jadis par le parlement et l’accession des fils de parens riches étrangers à l’armée. Ces derniers paient une pension élevée et contribuent de la sorte à l’éducation des autres cadets, qui, étant sortis d’un sang militaire, jouissent de certaines immunités. En Angleterre, on trouve juste que les services des pères soient réversibles sur la tête des enfans ; d’après ce principe, la dette contractée par le pays envers les hommes qui ont pratiqué le métier des armes se trouve payée aux fils par les familles de l’ordre civil[1]. Les jeunes gens qui n’ont point passé par l’école de Sandhurst peuvent néanmoins être reçus officiers dans la ligne ou dans la cavalerie, mais à la condition de subir un examen et d'acheter leur commission[2].

Jusqu’ici on n’aperçoit encore que les membres d’un grand système ; l’unité réside dans le conseil d’éducation militaire, council of military éducation, qui forme en quelque sorte la tête de l’enseignement. L’influence de ce conseil, composé d’hommes éminens, rayonne sur les différentes écoles, introduit les changemens et les réformes utiles, dirige les examens publics, communique en un mot l’impulsion aux études militaires dans tout le royaume-uni. L’élément civil et religieux y est représenté par un des hommes les plus lettrés de l’Angleterre, le chanoine Henri Moseley ; les autres membres sont des généraux et des colonels qui appartiennent à différens corps de l’armée[3].

  1. Les fils de civilians paient 120 liv. sterl. par an, tandis que les fils d’officiers qui sont morts au service, laissant leur famille dans le besoin, n’en paient que vingt. Ce sont les deux extrémités de l’échelle.
  2. Cet achat des commissions directes (purchase of direct commissions) nuit, on ne saurait se le dissimuler, aux développemens du collège militaire de Sandhurst. Il a été plusieurs fois question d’abolir ce dernier reste de l’ancien régime. C’est l’avis même du duc de Cambridge, qui, d’accord en cela avec le ministre de la guerre, désire que l’on n’entre plus dans l’armée anglaise que par une seule porte, celle d’un collège militaire.
  3. Ce conseil se compose du major-général Rumley, vice-président, du major-général Portlock, du chanoine Moseloy, du colonel EIwin, ancien inspecteur des études à l’académie de Woolwich, et du lieutenant-colonel Addison, connu par des ouvrages littéraires d’un mérite distingué.