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et la guerre, ayant sombré dans la grande révolte qui menaça, il y a trois ans, de détacher les Indes de la métropole, le collège militaire d’Addiscombe passa entre les mains du gouvernement anglais. Un des premiers actes du ministre de la guerre et du conseil d’éducation militaire fut d’inaugurer, pour l’entrée à Addiscombe, le système de concours qui avait produit d’heureux fruits à l’académie de Woolwich[1]. Jusque-là, les candidats étaient nommés par la compagnie des Indes, et leur nomination se trouvait ensuite subordonnée à un examen, ou, pour mieux dire, c’était l’examen qui était subordonné à la nomination. Comme le champ des études est à peu près le même au collège d’Addiscombe qu’à l’académie de Woolwich, il est inutile de s’y arrêter. Citons pourtant une branche de connaissances qui se rapporte au but particulier de l’institution : c’est l’histoire, la géographie et la langue de l’Inde. Les cadets apprennent à parler l’hindostani et à l’écrire dans les, deux caractères d’usage, le persan et le nagari. Les hommes d’état, les moralistes, ont plusieurs fois insisté sur l’avantage qu’il y aurait de bien connaître les Indes pour affermir la conquête de cette riche colonie. De jeunes officiers étrangers à la langue, aux usages, aux mœurs, apportent trop souvent avec eux des préjugés que l’étude d’une civilisation si différente de la nôtre, mais après tout antique et vénérable, eût adoucis. Le programme du gouvernement anglais pour éviter les fautes qui ont été commises est nettement tracé : conserver avec l’épée, éclairer avec l’exemple. Les cadets, généralement au nombre de cent cinquante, passent une année à Addiscombe ; ils entrent ensuite, selon leur ordre de mérite ou selon leur goût, dans le génie, l’artillerie ou la ligne. Il se peut d’ailleurs qu’un vote du parlement réunisse plus tard ce collège à l’académie royale de Woolwich, mais sans effacer les traits d’une éducation spéciale. Le service des Indes restera toujours distinct et recherché ; cette vie d’aventures, les campemens dans les jongles, la chasse au tigre, les perspectives imposantes pour l’imagination qu’ouvre la lutte avec les hommes et avec la nature, l’éblouissante figure d’un monde qui rayonne du côté de l’orient à travers les brouillards de la Grande-Bretagne, tout cela répond à un côté du caractère anglais, l’esprit d’entreprise.

Une autre école militaire, le collège royal de Sandhurst, prépare des officiers pour l’infanterie et la cavalerie de l’armée anglaise. Cet établissement fut fondé en 1799 à High-Wycombe ; trois ans après, il fut transporté à Great-Marlow ; enfin il s’est fixé à Sandhurst en 1812. Comme les Anglais tiennent à éloigner ces centres d’études de la contagion des grandes villes, le collège s’élève à trente milles

  1. Le premier examen public eut lieu à Chelsea-Hospital le 24 novembre 1859.