Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 29.djvu/268

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

service. Le programme des examens est assez étendu : il embrasse les mathématiques pures et appliquées, l’histoire, la géographie et la littérature de l’Angleterre, les classiques grecs et latins, la langue et la littérature françaises, l’allemand, les sciences expérimentales (la chimie et la physique), les sciences naturelles (la minéralogie et la géologie), le dessin géométrique et le paysage. Chaque candidat ne doit pourtant s’attacher qu’à cinq sujets : on a voulu par là réprimer chez la jeunesse cette malheureuse avidité de savoir qui effleure toutes les branches de l’instruction sans en pénétrer aucune. Le résultat du concours est rendu public, et ceux des aspirans qui ont succombé dans une première épreuve peuvent en tenter une autre six mois après, jusqu’à ce qu’ils aient atteint l’âge de vingt ans. Destinés non-seulement à contrôler, mais aussi à élever dans le pays le niveau des connaissances classiques, ces examens exercent une influence indirecte sur les écoles civiles d’où sortent les candidats. Le concours a mis un frein à l’ignorance et à la médiocrité, qui n’avaient trop souvent pour excuse (si excuse il y a) que des titres de noblesse ou une brillante condition de fortune[1].

Une autre réforme non moins importante que celle du concours substitué au système de nominations fut l’ordre du ministre de la guerre qui éleva l’âge d’admission des candidats : cet âge fut fixé entre seize et vingt ans. L’inconvénient de soumettre trop tôt les jeunes gens à la discipline militaire a été reconnu avec une haute sagesse par le général Portlock[2]. « Le caractère des adolescens exige, dit-il, une culture plus délicate que celle qu’on doit attendre des officiers chargés du commandement dans une école militaire. À leurs yeux, si jeune qu’il soit, l’élève est un soldat, et à peu de nuances près ils le traitent comme tel. Sans doute ils excellent à lui apprendre l’exercice ; mais ont-ils les qualités et l’expérience nécessaires pour former le moral de la jeunesse ? » Une autre conséquence des admissions prématurées était d’introduire une sorte de confusion et d’incertitude dans le système de l’enseignement. Aujourd’hui une division tranchée s’est établie entre le cours d’études qui précède et

  1. Une partie de l’examen est forcée, c’est celle des mathématiques ; les quatre autres sont abandonnées au choix des candidats. Ceux qui ne concourent point en français, ni en allemand, ni en dessin géométrique, doivent néanmoins fournir la preuve qu’ils ne sont point tout à fait étrangers à ces connaissances, et qu’ils seront capables de les cultiver dans la suite, s’ils sont admis à l’académie militaire de Woolwich. Le mérite de chaque composition se trouve évalué par un certain nombre de marks (points), et nul n’est accepté s’il n’en réunit au moins deux mille cinq cents. L’examen des langues vivantes a lieu de vive voix et par écrit. Il y a deux examinateurs pour chaque branche. L’examen est anonyme : chaque candidat laisse pour ainsi dire son nom à la porte et n’est plus représenté que par un chiffre durant toute la série des épreuves.
  2. Alors inspecteur des études à l’académie, aujourd’hui membre du conseil d’éducation militaire.