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LA
POESIE HONGROISE
AU XIXe SIECLE

II.
LES RAPSODES DE L'HISTOIRE NATIONALE.

Les deux poètes qui dominent la littérature hongroise du XIXe siècle, Vörösmarty Mihály et Petoefi Sándor[1], ont très nettement indiqué à leurs successeurs le rôle qui appartient aux lettres, à l’imagination lyrique surtout, dans le pays des Magyars. Certes il n’y a guère de ressemblance entre ces deux maîtres. Vörösmarty est un artiste scrupuleux et délicat plutôt qu’un génie inspiré, Petoefi est une nature fougueuse, aussi originale par le sentiment que par la forme. Je ne prétends pas retrouver, avec certains critiques hongrois, dans Vörösmarty la sérénité classique de Gœthe, dans Petoefi l’impétueux essor de Schiller. Gœthe, savant et poète, philosophe et artiste, observateur intelligent et respectueux des manifestations infinies de la puissance créatrice, Gœthe est un génie si complet qu’il est impossible de lui comparer personne dans notre XIXe siècle. Quant au généreux enthousiasme de Schiller, il est associé, à des réflexions si profondes, à une préoccupation si constante de la philosophie de l’art et de la liberté, qu’une telle nature de poète n’a pu

  1. Mihály, Michel ; Sándor, Alexandre. Les Hongrois placent le nom de baptême après le nom de famille. — Voyez sur Petoefi la Revue du 15 avril 1860.