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réflexions si sages sur les illusions des peuples, de ses encouragemens virils à la patience. « A mon dernier voyage en Angleterre, dit-elle en terminant, le roi s’est beaucoup informé auprès de moi de la santé de votre excellence, et la reine a pris beaucoup d’intérêt aux nouvelles que j’ai pu lui donner de vous. Ils se rappellent tous deux avec plaisir les visites fréquentes que vous leur faisiez à Paris. Mes fils désirent que je les recommande à votre souvenir, et j’espère, moi aussi, que de temps en temps vous vous souviendrez de moi. »

Entre tant de lettres recueillies un peu au hasard par Mlle Assing et publiées pêle-mêle, il est naturel que nous recherchions de préférence celles dont les signataires appartiennent à notre histoire. J’aperçois les noms de M. Guizot et de M. Thiers. M. de Humboldt, qui publiait alors l’édition complète des œuvres de son frère Guillaume, venait d’en envoyer deux volumes à M. Guizot, et celui-ci lui adresse ses remerciemens. La lettre est datée de Londres, où M. Guizot représentait la France comme ambassadeur (août 1840). J’y trouve quelques paroles curieuses sur l’absence de la vraie conversation dans les salons anglais, et un vif sentiment de la grandeur de la Prusse, qui s’éveillait alors aux idées libérales et attirait l’attention de l’Europe : « J’envie au baron de Bulow le plaisir de vous voir. Je regrette infiniment sa société à Londres. La conversation, la vraie conversation, nourrie et libre, est fort rare ici. La sienne me manquera beaucoup. Je voudrais bien aller quelque jour vous faire une visite chez vous, voir de près votre pays, celui de tous où l’esprit humain joue le plus grand rôle, et son nouveau roi, digne, me dit-on, d’un tel pays. » Les deux billets de M. Thiers sont de simples lettres de recommandation adressées à M. de Humboldt, la première en faveur de l’un de nos collaborateurs et amis, qui a laissé ici de bien vifs regrets, M. Alexandre Thomas « jeune Français plein de talent, de connaissances et de curiosité ; » la seconde pour M. Duvergier de Hauranne, qui se disposait, en 1857, à visiter l’Allemagne avec son fils. « Vous connaissez trop bien notre pays, écrit M. Thiers, pour que j’aie besoin de vous dire quel rôle considérable et toujours honorable M. Duvergier de Hauranne a joué dans nos assemblées, où il a été toujours fidèle à la cause de la liberté raisonnable, et non-seulement fidèle, mais singulièrement utile. Aujourd’hui, rentré dans la retraite et livré à l’étude, il va voir votre excellent pays, et j’ai pensé que je ne pouvais mieux faire que le recommander à votre bienveillance. Ce sera pour son jeune fils un souvenir impérissable que d’avoir vu le savant illustre qui honore le plus notre siècle… »

Citons encore une lettre qui se rapporte à notre histoire politique ; celle-là nous reporte en 1839, au milieu de cette émeute parlementaire