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géologiques, et que plusieurs objections tirées de l’étude de la paléontologie peuvent y être faites ; mais tant d’obscurités s’attachent encore à la chronologie des faunes des dernières époques, que cela ne saurait constituer pour M. Adhémar une fin de non-recevoir absolue. D’ailleurs il produit en outre, à l’appui de ses idées, deux faits curieux qui lui sont fournis par l’astronomie.

L’inégale épaisseur des deux calottes de glace qui, d’après son système, recouvrent les pôles doit déterminer un léger renflement au pôle antarctique, et il serait possible de constater cette inégalité pendant une éclipse de lune, en mesurant la longueur de l’ombre projetée par la terre. Lorsque le soleil est dans le plan de l’équateur, la ligne suivant laquelle ses rayons touchent la terre passe alors par le pôle, et l’ombre accusée sur la lune par la glacière australe doit atteindre son maximum. Or Kepler, observant une éclipse de lune toute semblable à celle qu’avait relatée Tycho-Brahé en l’année 1588, éclipse totale et quasi centrale, trouva que la durée de l’obscurité totale avait été plus courte que ne l’indiquait le calcul, et que le reste de la durée de l’éclipse, avant comme après cette obscurité, fut encore plus court, comme si le diamètre de la terre eût été moindre à l’équateur qu’aux pôles. Un pareil fait s’expliquerait aisément par la présence de la calotte de glace ; mais il faudrait admettre que l’aplatissement de la terre vers ses pôles n’est vrai que de sa partie solide, et abstraction faite des deux coupoles glacées qui la surmontent. M. Adhémar estime approximativement la saillie totale qui en résulte à cinquante ou soixante lieues.

Voici maintenant le second fait. L’astronome Maraldi avait jadis constaté aux pôles de la planète Mars des tâches lumineuses qu’il supposait dues à des amas de neige. Le célèbre Herschel les étudia avec un soin particulier. Le centre de ces deux taches ne lui parut pas exactement placé aux pôles de rotation. La déviation lui sembla plus grande pour la tache boréale que pour celle du pôle sud. Les changemens observés dans les grandeurs absolues confirmèrent l’idée qu’on avait là sous les yeux des amas de neige et de glace. Si en 1781, par exemple, la tache sud parut extrêmement étendue, ce fut après un long hiver de l’hémisphère austral, après une période de douze mois durant laquelle le pôle correspondant avait été entièrement privé de la vue du soleil. Si au contraire, en 1783, la même tache se montra très petite, c’est que depuis huit mois le soleil dardait ses rayons d’une manière continue sur le pôle sud de Mars. La tache boréale présenta aussi des variations de grandeur absolue, étroitement liées à la position du soleil relativement à l’équateur de la planète. Cette différence manifeste entre les deux glacières de Mars, ajoute M. Adhémar, a pu se produire en douze mois, qui forment à