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ce dernier mouvement est tellement lent qu’il ne paraît pas pouvoir rendre compte des révolutions nombreuses accusées par l’étude de l’écorce terrestre, et d’ailleurs les effets ne pourraient s’en faire sentir qu’à la suite d’immenses périodes, ce qui exclurait l’idée d’une grande catastrophe telle que le déluge. Nous verrons cependant tout à l’heure le rôle qu’on lui a fait jouer.

Une autre difficulté se présente pour une inondation aussi rapide et aussi étendue. Comment la masse d’eau qu’elle suppose a-t-elle disparu ? On veut bien admettre qu’une partie se soit précipitée dans l’intérieur du globe par quelques larges fissures ; mais pourquoi la totalité de la nappe liquide n’a-t-elle pas suivi la même voie ? On dira encore que l’abaissement du niveau des mers résulte de l’affaissement d’immenses cavernes en raison de la rupture des piliers qui en soutenaient les voûtes ; comment alors plusieurs cataclysmes s’étaient-ils répétés à des époques antérieures ? Un professeur de mathématiques, M. Adhémar, a cru pouvoir résoudre toutes ces difficultés en admettant un déplacement de la masse liquide par suite de la fusion des glaces qui s’accumulent tour à tour à l’un ou à l’autre pôle, et cette accumulation, il la déduit du mouvement même de notre planète. Ses idées passèrent d’abord en France assez inaperçues, mais elles rencontrèrent au dehors d’habiles défenseurs et occupèrent quelques sociétés savantes. M. Adhémar ne trouva rien dans ce qu’on lui objecta qui pût ébranler sa conviction, et dix-huit ans plus tard, c’est-à-dire cette année même, il vient de reproduire sa théorie, fortifiée de considérations nouvelles qui appellent un examen sérieux.

Pendant que la terre se meut autour du soleil, son axe de rotation, en se déplaçant, ne demeure pas rigoureusement parallèle à lui-même. Sa direction est sans doute sensiblement la même tout le cours d’une année ; mais si l’on compare les positions que cet axe a occupées à deux époques éloignées l’une de l’autre d’un laps de temps assez notable, on s’aperçoit que sa direction a réellement changé. L’observation a démontré que le plan de l’équateur céleste mené par le centre de la terre perpendiculairement à la ligne des pôles change peu à peu de direction, et déplace par conséquent la ligne des équinoxes, qui est l’intersection de ce plan avec le plan de l’écliptique. Du changement lent et progressif de la direction de la ligne des équinoxes dépendent les époques auxquelles commencent les diverses saisons de l’année. Par exemple, l’équinoxe de printemps est chaque année en avant d’une certaine quantité sur l’époque à laquelle il serait arrivé, si l’axe de la terre n’éprouvait pas son changement continuel de direction. C’est pour cela que le mouvement de révolution de cet axe autour de la perpendiculaire au plan