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sage et hardi dans une grave complication extérieure, on le verra ici prendre, avec une initiative presque téméraire, la tête du mouvement qui agitait le nord Scandinave.

Ce n’était pas cependant que le roi Oscar se fût montré tout d’abord favorable au scandinavisme. Au contraire, quatre mois à peine après son avènement, pendant l’été de 1844, il avait mis obstacle à un voyage projeté par les étudians d’Upsal à Copenhague. À la même époque le cabinet suédois avait paru à M. de Bacourt, envoyé en mission temporaire, assez froid sur la question de la succession danoise. On pouvait craindre dès lors un démembrement du Danemark. La Prusse, disait-on au baron d’Ihre, ministre des affaires étrangères à Stockholm, abandonnerait peut-être pour le Slesvig-Holstein les îles danoises à la Russie, qui, à son tour, désintéresserait l’Angleterre par Bornholm ou peut-être même par Gottland ; ne fallait-il pas que la Suède conclût au plus tôt avec le Danemark un traité défensif, que confirmeraient les grandes puissances ? — Et M. d’Ihre répondait que le cabinet de Stockholm n’avait encore reçu aucune communication à ce sujet ; qu’il croyait savoir qu’il y avait eu en effet récemment des conférences à Vienne sous la présidence de M. de Metternich, mais qu’officiellement il n’en avait rien su, et qu’il resterait sur la réserve. — C’était, il faut l’avouer, beaucoup de quiétude dans un moment déjà bien périlleux pour le Danemark. Le prince Frédéric de Hesse, candidat à la couronne danoise, venait d’épouser la grande-duchesse Alexandra de Russie, et on avait quelques raisons de croire que le roi Oscar inclinait pour ce prétendant. Évidemment, pendant les quatre premières années de son règne, Oscar ne résistait pas encore ouvertement à la double influence de la Russie et de la Prusse. Il eût accueilli le candidat de la première, et, quant à la seconde, il avait des sympathies pour le roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV, dont il appréciait les grandes qualités, et dont le règne, ouvert peu de temps avant le sien, débutait par des mesures libérales.

Mais en 1848 la Prusse, entraînée par la démagogie allemande, attaqua ouvertement le Danemark. Oscar n’hésita point : un corps suédo-norvégien se mit en campagne, et le scandinavisme reçut une première et solennelle consécration. Nul n’y pouvait redire assurément ; ce n’était pas un résultat excessif ni regrettable que cette alliance défensive entre deux peuples voisins et frères, et, dans ces limites, c’étaient les intérêts des peuples que la dynastie suédoise prenait l’engagement de sauvegarder et de défendre. L’Europe le reconnut ; lorsqu’à la suite de la guerre, les grandes puissances s’accordèrent à régler enfin, par le traité de Londres de 1852, la question difficile et périlleuse de la succession danoise, la Suède leur fut adjointe comme signataire et garante du traité. L’arrangement de 1852 é