occupation moscovite qu’il s’agit ; il apprend que cette visite est le résultat d’une gracieuseté d’Alexandre, à qui l’administration suédoise a demandé des modèles d’équipement militaire, et il en exprime tout haut son mécontentement. Le 22 août 1833, le navire russe l’Hercule, en passant devant la citadelle de Waxholm, qui précède et protège la capitale de la Suède, néglige de répondre à la sommation d’envoyer, selon l’usage, ses papiers à terre. Peu de temps auparavant, un cutter anglais, appartenant à lord Exmouth, avait passé outre en bravant la forteresse, et l’on venait de donner des ordres très sévères. Deux boulets lancés contre le vaisseau russe le forcent à se soumettre. La nouvelle en arrive bientôt à Stockholm ; l’idée qu’on a pu, sous un prétexte quelconque, tirer avec des canons suédois contre des Russes excite la joie populaire, que les journaux entretiennent et exaltent, et que la prudence du gouvernement empêche seule de se porter à quelque excès. Tel était, pendant toute la seconde moitié du règne de Charles-Jean, l’état des esprits, plein d’amers souvenirs, plein d’agitation et de passion dans le présent, et de périls pour l’avenir.
Oscar, prince royal, témoin longtemps inquiet et ému de ces haines populaires, avait compris à l’avance toutes les difficultés qu’elles menaçaient de créer à son règne, et s’efforçait, sans préparer de rupture avec un voisin redoutable, de se rapprocher du peuple qu’il était appelé à gouverner un jour. Loin de rechercher les témoignages d’amitié du tsar, il n’était qu’à demi flatté, soit des vases précieux qu’on lui envoyait de Saint-Pétersbourg en 1831, soit de l’ordre de Sainte-Catherine, que recevait, en avril 1832, la princesse royale, soit des tabatières ornées de diamans, des rubans et des plaques qu’on distribuait à son entourage. Un des épisodes de cette triste histoire qui lui furent le plus pénibles, nous le savons, et nous ne le rappelons ici que parce qu’il caractérise l’habileté de la politique russe à envelopper par des alliances de famille des états secondaires et voisins, fut, en 1838, le mariage du duc de Leuchtenberg, frère de la princesse royale de Suède et fils du prince Eugène Beauharnais, avec la grande-duchesse Olga, princesse impériale de Russie. Pendant les dernières années du règne de son père, Oscar, malgré toute sa louable prudence, ne laissa pas que de se mettre quelquefois à l’unisson avec le sentiment populaire. Il pressait activement les travaux de fortifications des côtes orientales de la Suède, et permettait à ses jeunes fils de prendre part aux démonstrations Scandinaves, où ne manquait jamais le refrain du chant de Tegner à la gloire de Charles XII : « Hors d’ici, Moscovites ! En avant, mes garçons bleus ! »
La Russie de son côté, pendant tout le règne de l’empereur Nicolas, ne ménagea pas plus les susceptibilités ombrageuses des peuples