Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 28.djvu/222

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rurale à l’aide d’un personnel restreint constamment attaché à la ferme, et le remplacement par les machines de toute main-d’œuvre qui se prête à une semblable substitution.

Ce but peut-il être complètement atteint, de telle sorte que nous n’ayons plus jamais besoin d’ouvriers de passage ? On aurait tort de le croire ; mais si l’agriculteur, moins heureux sous ce rapport que le manufacturier, ne peut pas demander à la mécanique un concours entier et constant, il peut du moins être puissamment aidé par elle dans une foule de travaux, et même dans les momens les plus difficiles, la récolte des foins et la récolte des grains. Chaque progrès dans ce sens sera un bienfait public, et les perfectionnemens déjà obtenus, que nous a fait voir l’exhibition de 1860, sont un gage sérieux des perfectionnemens à obtenir encore.

La France n’avait fourni au concours agricole universel de 1856 que 1, 460 machines, instrumens ou lots d’outils. Cette fois le nombre des exposans s’est accru de 414 (394 en 1856, 808 en 1860), et le nombre des lots s’est élevé au chiffre de 3, 902. En pareille matière cependant le nombre peut-il être invoqué comme un progrès, et la qualité ne doit-elle pas figurer seule en ligne de compte ? J’estime que la qualité et la quantité sont deux choses dont il faut se féliciter. En effet, la quantité est une preuve évidente que la machinerie agricole excite davantage les esprits, occupe un plus grand nombre de constructeurs, et, mieux appréciée qu’autrefois, trouve chez nos cultivateurs un placement plus facile. Le prix des instrumens perfectionnés a suivi, depuis quelques années, une marche qui en confirme le plus grand débit. Des industries spéciales se sont proposé de réunir sous le même toit tous les engins que construisent nos divers fabricans, et le développement pris par ces maisons de commission ne peut provenir que de l’importance des demandes qui leur sont journellement faites. Donc, à ce point de vue, la quantité est déjà un progrès que nous sommes heureux d’avoir à constater.

La qualité en est un autre non moins important, puisqu’elle multiplie par sa propre valeur la valeur du premier progrès, et que l’utilité d’une machine peut toujours se mesurer à la somme de services qu’elle rend. Quelle différence entre le matériel agricole qui garnit nos fermes modernes, je ne dis pas nos fermes-écoles, pas même nos grandes fermes, mais nos fermes ordinaires, et les incommodes outils dont se servait, il y a peu d’années, le laboureur ! Les hommes qui ont étudié cette question le savent, et les visiteurs de l’exposition n’ont pas dû tarder à le comprendre. Au premier pas fait sous les vastes hangars que remplissaient les divers instrumens de notre agriculture, on admirait ce progrès, et l’esprit aussitôt se complaisait à voir le cultivateur d’aujourd’hui dirigeant sans fatigue et la tête haute les attelages et la vapeur qui travaillent pour faire,