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gien une révision formelle du pacte d’union, capable de prévenir l’imminent péril d’une plus grave rupture. »

Telle était la motion de M. le comte Anckarsvärd, un peu exagérée peut-être dans l’expression de certains griefs et dans sa forme, mais qui avait le mérite de mettre enfin à découvert une vive blessure, et d’en rechercher le remède. Pendant que les différens ordres de la diète suédoise commençaient à discuter cette proposition, un nouvel incident vint augmenter l’agitation des esprits. On apprit que le storthing venait de voter la suppression de l’article 14 de la constitution norvégienne, aux termes duquel « le roi peut nommer aux fonctions de gouverneur-général de Norvège un Norvégien ou un Suédois. » Depuis longtemps c’était le but déclaré de la représentation norvégienne de rompre cet autre lien avec la Suède qui lui semblait une marque de dépendance ; l’attention qu’avaient mise les rois à ne nommer en dernier lieu pour gouverneurs que des Norvégiens, ou à laisser ces fonctions vacantes, ou à les convertir enfin, comme en 1856, en une vice-royauté confiée à l’héritier du trône, n’avait fait qu’encourager les Norvégiens à n’y plus admettre de Suédois, et ils s’étaient efforcés d’y parvenir en votant soit l’abolition complète du poste de gouverneur-général, soit la suppression de la faculté laissée au roi d’y nommer un Suédois au même titre qu’un Norvégien. Ils renouvelaient aujourd’hui et pour la seconde fois la même tentative sous cette dernière forme. La nouvelle de cette résolution avait d’ailleurs été publiée par la presse norvégienne avec des commentaires peu bienveillans pour la Suède et l’union, et l’impression en fut d’autant plus profonde à Stockholm au lendemain de la motion Anckarsvärd. Un autre membre de la chambre de la noblesse de Suède, M. Dalman, prétendit répondre à la démonstration du storthing et des Norvégiens en proposant à la diète de s’adresser directement au souverain pour le supplier de ne pas adresser sa réponse avant d’avoir saisi le parlement suédois de cette question ; elle intéressait au plus haut degré l’union, suivant M. Dalman, et ne devait par conséquent être résolue qu’après que les deux représentations en auraient fait, chacune de son côté, l’examen. La diète suédoise, après de très vifs débats, a fait en somme bon accueil aux deux propositions de M. Anckarsvärd et de M. Dalman, s’apprêtant à demander la révision du pacte d’union sur cette base que, des deux états unis, la Suède est principale et supérieure, et à exprimer au roi l’avis que les articles du riksact ou acte d’union et ceux même de la loi fondamentale de Norvège qui concernent des rapports communs entre les deux royaumes ne peuvent être modifiés qu’avec le concours des états suédois, qui ont jadis, par leurs commissaires, discuté avec les représentans norvégiens et consenti ces mêmes articles.