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un commencement d’organisation. Ils quittèrent les cimes (greben) du Caucase, et, descendant vers le Térek, se mêlèrent aux Cosaques riverains de ce fleuve, en se distinguant toujours par leur nom primitif. Les premiers Grebenskoï, presque tous célibataires, se marièrent à de jeunes filles tchetchenses, qu’ils enlevaient dans leurs razzias ; de ce mélange est sortie une magnifique race. Leurs femmes sont remarquables par leur beauté native, par une tournure élégante et noble. M. de Gilles nous les représente en peintre amoureux de son modèle. Rien de plus gracieux que leurs traits et leur costume au type tout oriental : un teint brun, mat doré, de grands yeux noirs frangés de longs cils, des sourcils admirablement dessinés, un regard profond et par momens rayonnant comme l’éclair, une bouche un peu grande, avec des lèvres de corail qui laissent apercevoir, des dents d’une blancheur éclatante, une chevelure riche et ondoyante, d’un noir de jais chez la plupart, partagée en deux bandeaux étroits qui encadrent le front. Pour coiffure, elles ont la schirinka, pièce de soie rouge nouée gracieusement autour de la tête et terminée par deux bouts qui s’arrondissent derrière les oreilles, de manière à bouffer un peu sur le chignon, en façon de bavolet. Sur la schirihka retombe comme un voile de mariée un transparent de tulle blanc quelquefois brodé. Le vêtement principal, une tunique noire ou bleue, descend jusqu’aux genoux et s’ouvre sur la poitrine, où sont deux rangées de longues agrafes en argent, qui forment comme de petits brandebourgs au-dessous du sein. Si cette tunique a des demi-manches, elle prend le nom russe de foufaïka, mais si les manches, courtes jusqu’à l’avant-bras, sont longues en dessous, c’est le tchekmen ou robe tcherkesse, ouverte jusqu’en bas et bordée tout autour d’un galon d’argent. Sous la foufaïka ou le tchekmen est une robe longue, en coton blanc ou en soie rouge. Pour braver les rigueurs de l’hiver, elles portent le surtout à petit collet et à manches courtes, sorte de polonaise en velours bleu, doublée de fourrure de petit-gris et bordée de martre. Autour du cou s’enroule un collier de corail ou de petites perles chez les femmes riches ; sur la poitrine s’étagent trois, quatre et jusqu’à cinq chaînes de monnaies enfilées et entremêlées de pièces antiques, précieux héritage de famille et ornement favori des beautés cosaques. Les hommes ne sont pas moins recherchés dans leur mise, à la fois élégante et martiale ; ils mettent surtout une véritable coquetterie dans le soin de leurs armes, qu’ils veulent avoir aussi belles que possible ; un pauvre Grebenskoï y consacre quelquefois tout ce qu’il possède d’argent, ne se réservant que le fonds de terre qui le fait vivre.

Les Cosaques se considèrent tous comme nobles et égaux par la naissance ; ils n’admettent entre eux aucun titre aristocratique. C’est