Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 27.djvu/451

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

guerre civile, qui dure déjà depuis deux ans, ne semble pas près du dénoûment, toujours fuyant, quoique toujours annoncé comme prochain. Depuis que les partis sont aux prises, c’est-à-dire depuis le mois de janvier 1858, il s’est livré 8 batailles importantes, 24 combats de second ordre, 39 engagemens d’un degré inférieur, en tout 71 actions militaires, sur lesquelles 16 seulement ont été à l’avantage des constitutionnels. Au reste, la guerre civile n’est le plus souvent qu’un prétexte pour commettre toute sorte d’excès et de déprédations. En réalité, le parti qui s’appelle fédéral ou constitutionnel, ou même constitutionnaliste, comme on dit au Mexique, n’est qu’un ramassis de bandes indisciplinées ravageant le pays. Chaque chef agit pour son compte, et ces chefs sont innombrables. Les plus connus par leurs méfaits sont Carbajal, Alatriste, Pueblita, Villalta, Alvarez.

Au mois de mai 1859, les fédéraux pillaient la maison de monnaie de Guanajuato, et s’emparaient de 180,000 piastres, dont 90,000 appartenaient à des Anglais. Un des ministres de M. Juarez, M. Zamora, disait pour expliquer le fait que ce n’était là « qu’une occupation temporaire de fonds étrangers destinés à subvenir aux besoins les plus pressans de l’armée fédérale. » A Tepic, Coronado, un général constitutionnel, extorquait à M. Allsopp, consul britannique, une somme de 11,000 piastres. Sur un autre point, le colonel Carretero s’emparait d’un convoi de six cents mules chargées appartenant aux négocians de Puebla. Au mois de novembre, les fédéraux, en s’enfuyant de la ville d’Oajaca, emportaient 40 arrobes ou 10 quintaux d’argent pris dans une église. Ces étranges chefs du radicalisme mexicain ont trouvé un nouveau moyen de se procurer des ressources. Il leur est arrivé quelquefois de s’emparer des prêtres ou des moines, et de ne les rendre que moyennant argent. À Zacatecas, ils rendaient huit prêtres pour 8,500 piastres ; à San-Luis, la liberté d’un seul a coûté 10,000 piastres.

La vie des étrangers n’est pas plus en sûreté que leurs intérêts et que l’existence ou les intérêts des nationaux. Un jour, pendant le siège de Mexico, au mois de mars 1859, quelques Allemands, choisissant bien leur temps à la vérité, projetèrent une excursion au grand désert. Ils s’arrêtèrent le soir à la ferme de Cuaji-Malpa pour continuer leur course le lendemain. Ils venaient de faire paisiblement leur partie de whist, lorsque les portes furent enfoncées, et l’un d’eux, le docteur Fuchs, tomba frappé d’une balle. Ils furent tous sommés de se rendre et pillés. Des muletiers qui étaient dans le même ferme et qui transportaient des marchandises à Toluca eurent le même sort, tout ceci au cri de vive la fédération ! On ne saurait dire que les chefs qui font la guerre pour le gouvernement de Mexico s’interdisent absolument des méfaits de ce genre. Ainsi