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obtenus par l’armée du nord. Le président élevé au pouvoir en janvier 1858 et adopté par le parti conservateur, le général Zuloaga, laissait voir une déplorable médiocrité politique, qui devenait une cause de déconsidération et de défiance universelle. Il en résulta une sorte d’équilibre entre le gouvernement de Mexico, au nom duquel Miramon poursuivait inutilement ses succès, et le gouvernement qui continuait à vivre à la Vera-Cruz, s’enhardissant de l’impuissance même des opérations dirigées contre lui. Tous les avantages qui avaient semblé favoriser le pouvoir de Zuloaga, reconnaissance du corps diplomatique, succès d’un général habile, ne servirent nullement à décider la question entre les partis. C’est de cet ensemble de faits que naquit une péripétie nouvelle dans la situation du Mexique. Le général Echeagaray, au lieu de tourner ses efforts contre la Vera-Cruz, qu’il était chargé de prendre, se mit en insurrection contre le président Zuloaga, de qui il tenait ses pouvoirs. Echeagaray avait fait son mouvement à Ayotla, en publiant, selon l’habitude, un nouveau plan politique. Le 23 décembre 1858, le général Roblès Pezuela, commandant de la garnison de Mexico, suivait l’impulsion et adoptait à son tour un programme qui n’était que le plan d’Ayotla un peu modifié. Zuloaga avait tout juste le temps de se réfugier à la légation britannique, tandis que Roblès devenait le maître de la capitale et du gouvernement. Le mot de ce pronunciamicnto, né du désordre universel, était la fusion ou la réconciliation des deux partis en lutte. On s’était hâté de nommer un comité où entraient le général Mariano Salas, le licencié Castaneda, le général Casanova ; une junte composée de cent cinquante notables devait se réunir peu de jours après pour élire un président provisoire, en attendant l’organisation définitive de la république, qui devait être l’œuvre d’un congrès où tous les partis seraient représentés.

Or il restait à savoir deux choses : d’abord comment M. Juarez répondrait, au nom des constitutionnels, à ces offres de conciliation qui lui étaient adressées, ensuite quelle serait l’attitude de Miramon en face des événemens qui venaient de s’accomplir. — M. Juarez répondit avec dédain aux propositions qui lui étaient transmises. Quant à Miramon, il était loin, et à l’heure même où cette crise éclatait à Mexico, il infligeait une rude défaite à l’un des principaux chefs constitutionnels, Santos Degollado. Une chose était visible toutefois, c’est que de l’attitude du commandant de l’armée du nord dépendait en grande partie le succès du mouvement de Mexico. Cette crise même augmenta l’importance du jeune général, et tel était l’ascendant qu’il exerçait déjà, que lorsque la junte se rassembla, le 1er janvier 1859, pour élire un président provisoire, ce fut lui qui réunit la majorité ; il eut 52 voix, le général Roblès n’en obtint que 46.