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le sort même du ministère, et exposerait de gaieté de cœur le parti libéral à de nouveaux et regrettables déchiremens.

Un débat retentissant de la seconde chambre prussienne vient de rappeler sur les divisions intestines de l’Allemagne l’attention de l’Europe. La Prusse a subi dans ces derniers temps plusieurs échecs au sein de la diète germanique. Ses idées sur la réorganisation de l’armée fédérale ont été repoussées ; elle n’a pas été plus heureuse dans ses efforts généreux en faveur des libertés de la Hesse électorale. Nous avons expliqué, il y a plusieurs mois, les circonstances nouvelles de cette malheureuse question de la Hesse, qui, après avoir failli, il y a dix ans, faire éclater la guerre entre la Prusse et l’Autriche, revenait cette année devant la diète. La chambre hessoise avait demandé le l’établissement de la constitution de 1831, et la Prusse l’appuyait dans sa demande. Le gouvernement hessois proposait de mettre en vigueur la constitution de 1852, qui avait obtenu la sanction de la diète, lorsque celle-ci, dans cette époque des réactions triomphantes, déclarait la constitution de 1831 incompatible avec les lois fédérales. Cette triste question hessoise est comme le résumé des difficultés qui travaillent l’organisation politique actuelle de l’Allemagne. Il y a en Europe peu de gouvernemens plus scandaleux que celui de la Hesse électorale ; il n’en est pas contre lesquels les populations soient mieux fondées à élever une protestation permanente. Là éclate donc, sous le plus vilain jour, le mal secret qui ronge les petits états allemands, le divorce de peuples qui ont besoin d’être gouvernés économiquement, qui tendent par leurs aspirations à une grande vie nationale, avec les intérêts de petites cours et de petites maisons princières toujours tremblantes devant la perspective des médiatisations que la première commotion européenne dont les secousses atteindront l’Allemagne ne peut manquer d’entraîner. L’intérêt princier de la majorité des états secondaires, alors appuyé par l’empereur Nicolas et par l’Autriche, l’emporta donc en 1852, dans la diète, sur la légitimité des réclamations hessoises. La même coalition, toujours soutenue par l’Autriche et toujours animée de la même jalousie contre la Prusse, vient d’opposer, le 24 mars dernier, un nouveau déni de justice au peuple hessois. La Prusse se devait à elle-même de protester contre la décision fédérale qui a encore refusé aux Hessois le l’établissement de la constitution de 1831 : elle l’a fait avec une certaine énergie ; elle a déclaré que la diète a outre-passé sa compétence, et que le gouvernement prussien se tenait pour délié des obligations que pourraient entraîner les conséquences d’une telle décision. La diète, sur la proposition du ministre d’Autriche, son président, a répondu que les résolutions légales de la majorité étaient obligatoires pour les confédérés. C’est encore cet antagonisme funeste de la légalité contre la justice où, soit malheur, soit maladresse, l’Autriche se place toujours, et où depuis quelque temps elle obtient si peu de succès. Dans ce conflit, l’opinion est intervenue avec éclat par l’organe de la seconde chambre prussienne, et sur l’initiative éloquente de M. de Wincke, qui a demandé pour le cabinet prussien un