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DE LA
RENAISSANCE LITTERAIRE
EN GRECE

LES POETES ZALOKOSTAS ET ORPHANIDIS.

I

La renaissance littéraire de la Grèce n’a pas été, comme son réveil politique[1], l’objet d’une attention passionnée de la part des autres peuples. C’est chose toute simple : le grec est considéré, dans le reste de l’Europe, comme une langue morte, et l’on s’inquiète peu de savoir quelle sorte de langage a succédé à ’idiome splendide d’Homère. L’étude de ce langage offrirait cependant un très vif intérêt, car, sous les diverses transformations qu’il a subies depuis quatre siècles, il est facile de reconnaître chacune des phases dramatiques que le peuple grec a lui-même traversées. Les Vénitiens, les Génois, les Francs, les Turcs, tous les peuples qui ont successivement occupé ce malheureux pays ont laissé dans la langue même des traces de leur passage. En Épire, où l’oppression musulmane s’est montrée la plus dure, où elle subsiste encore, le grec est à peu près méconnaissable, tant il est surchargé de barbarismes albanais et turcs. En Morée, où la domination des Francs s’est maintenue le plus tard, où leur influence s’est le mieux établie, les idiomes, mélangés

  1. Voyez, sur les héros des guerres de l’indépendance en Grèce, la Revue du 15 avril, 15 juin et 1er octobre 1859.