qui joue un si grand rôle dans la végétation, pénètre inégalement le sol suivant la constitution de celui-ci, elle le lave ou elle l’ameublit suivant qu’elle y est versée avec plus d’abondance ou de rapidité ; la violence des ondées auxquelles sont exposées certaines chaînes explique l’arrêt de développement de végétation qu’on n’observe pas à de plus hautes altitudes sur des pics isolés moins exposés à ces pluies diluviales. L’eau répandue en si grande abondance ravine la montagne sans rafraîchir le sol ; elle détermine dans les Alpes ces gonflemens inopinés des torrens connus sous le nom de runsen, et dont M. F. de Tschudi nous fait une triste peinture. Les runsen sont en Suisse plus redoutés encore que les orages et les avalanches ; les flots gonflés se précipitent de toutes les pentes des rochers avec un bruit pareil à celui du tonnerre, et ce qui dans l’été se réduisait à un simple filet d’eau, s’échappant sur la pente, au milieu des cailloux, prend alors les proportions d’une immense cataracte. L’eau se tamise surtout dans le sol quand elle tombe par petites quantités, et qu’elle est reçue sur un lit de verdure par des couches de mousses ou de feuilles qui en distribuent lentement l’action bienfaisante et en arrêtent les épanchemens violens. On comprend donc qu’à de grandes hauteurs les sources soient peu abondantes. MM. Schlagintweit leur assignent dans les Alpes, pour limite supérieure, une altitude de 2 500 à 3 000 mètres, et en certaines parties de la chaîne cette limite descend beaucoup plus bas. Dans l’Himalaya, elle s’élève considérablement, et M. J.-D. Hooker a rencontré à un mille au-dessous du grand glacier de Kinchinjhow, par une altitude de 4 876 mètres, une source chaude qui marquait 42 degrés centigrades.
L’eau n’est pas moins nécessaire aux animaux qu’aux plantes ; mais l’animal n’est pas fixé au sol, il peut aller chercher l’eau où elle se trouve, s’abreuver dans les torrens et aux bords des glaciers, il puise même dans l’atmosphère une humidité qui étanche en partie sa soif ; il se meut, et il lui est possible, en changeant de station, d’éviter ou d’adoucir l’action des extrêmes de température dont le végétal aurait à souffrir. Les animaux peuvent donc au moins momentanément s’élever plus haut que les plantes ; mais les espèces herbivores sont forcément ramenées de temps à autre vers la zone végétale qui leur fournit seule la subsistance. Leurs ascensions d’ailleurs ont aussi leur limite. Le chamois lui-même, le plus hardi et le plus agile des visiteurs des cimes alpestres, ne dépasse pas 3 000 ou 3 500 mètres ; le bouquetin ne se hasarde jamais aussi haut. Le renard se laisse entraîner parfois jusqu’à une hauteur de 3 300 ou 3 400 mètres à la poursuite des poules de neige ; l’ours se montre plus rarement à de pareilles altitudes. Les rongeurs sont, entre les mammifères, ceux qui habitent le plus haut. M. Charles Martins a