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de la Lombardie, la laissera encore de 2 ou 300 millions supérieure à 6 milliards. Celle de la France n’est pas encore de 9 milliards. Le paiement des intérêts de la dette en Autriche réclamait, en 1848, sur un budget de 780 millions de francs, 240 millions, soit à peu près le tiers. Pour la même année, le service de la dette en France se montait à 310 millions sur un budget de dépenses ordinaires de plus de 1,800,000,000. Le gouvernement autrichien est débiteur envers la banque de Vienne de 850 millions. Au moindre choc, cet établissement, déjà si peu utile au commerce, croulerait sans restauration possible. La Banque de France n’est créancière de l’état que pour 45 millions, elle vit d’une existence indépendante et assure au commerce tout entier les plus sérieux avantages. Les impôts directs et indirects ont été accrus en Autriche, pour les années 1859 et 1860, de façon à produire annuellement 40 millions de florins de plus, soit le septième environ des recettes ordinaires de 1858, qui se sont élevées à 240 millions. En France, on a seulement subi le décime de guerre. Enfin, tandis que le dernier emprunt autrichien n’a pu se négocier à Londres, on sait avec quelle facilité nous nous adressons chez nous-mêmes au crédit. En face d’un semblable tableau, n’a-t-on pas lieu de regarder comme dérisoires les moyens proposés jusqu’ici pour restaurer le crédit autrichien, et qui se réduisent à trois : 1o paiement en espèces des intérêts des métalliques, 2o réduction problématique de 38 millions de florins sur le budget de l’armée et diminution d’un certain nombre d’employés civils, 3o promulgation de la patente impériale sur l’amortissement de la dette et nomination d’une commission chargée d’en vérifier la situation ? Quant à l’espoir entrevu d’affranchir les créanciers de l’état de la taxe du cinquième sur les intérêts semestriels, rien n’est encore venu le confirmer.

La presse de Vienne a beaucoup parlé, il est vrai, d’un mémoire présenté à l’empereur François-Joseph, dans lequel le ministre des finances exposerait, comme il l’a déjà fait en 1855, le plan qu’il croit le plus propre à améliorer la situation présente. M. le baron de Bruck a donné des preuves d’une sagacité rare et d’une louable ténacité : nul homme d’état ne paraît plus propre, dans les circonstances actuelles, à jouer le rôle d’un habile conseiller ; mais il y a des choses au-dessus des forces humaines, et l’expérience la plus consommée ne pourra trouver un troisième parti à prendre là où il ; ne s’en présente que deux. Le gouvernement autrichien doit parer à la fois au déficit du passé, au déficit du présent, au déficit inévitable de l’avenir. Le passé lui a légué, avec des charges énormes, l’embarras du cours forcé du papier-monnaie. Cet embarras est tel qu’à la première goutte le vase trop plein peut déborder. Un nouvel