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les armes, tout en profitant des avantages qu’offrent les projectiles allongés. La Suède et la Suisse ont pris l’initiative de cette réforme ; elles ont adopté le diamètre de six lignes anglaises, environ 13 millimètres, probablement parce que c’est en Angleterre qu’une partie de leurs carabines ont été fabriquées. Cet exemple a été suivi dans tout le continent. Depuis la guerre de Crimée, la Russie a réformé en totalité l’armement de ses troupes, qui était par trop inférieur à celui des autres puissances. L’Autriche s’occupait d’un semblable travail, auquel une réorganisation complète de ses arsenaux servait de prélude, lorsqu’elle a été surprise par la guerre d’Italie, et d’après des notes qui méritent toute confiance, elle possédait déjà alors 400,000 fusils rayés tout neufs, d’une excellente qualité, d’un fort petit calibre, mais en revanche lançant des balles plus allongées qu’aucunes de celles employées en Europe. Il avait donc été possible à cette puissance d’en pourvoir toute son armée active. L’Angleterre, après avoir adopté la carabine Enfield, qui lui a été si utile dans la guerre de l’Inde, a essayé plusieurs autres modèles, parmi lesquels son choix ne paraît pas définitivement arrêté. Toutes ces armes sont d’un calibre de 12 à 14 millimètres et à tige ; une dimension aussi faible se prêterait mal à l’admission d’une balle évidée. En ce moment, la Belgique et le Piémont sont peut-être les seuls états où le calibre français de 17 à 18 millimètres ait été conservé.

Chacun des deux systèmes qui ont prévalu en France et à l’étranger a des avantages qui lui sont propres. Les armes à tiges d’un calibre réduit sont légères, et dans l’opinion de ceux qui les préconisent, elles ont une justesse aussi grande que la carabine des chasseurs à pied. Le tir est plus rasant, et quoique la balle ait un poids moindre, comme elle est lancée par une charge de poudre relativement plus forte, elle ne perd pas beaucoup de son efficacité aux portées extrêmes. C’est là d’ailleurs une question qui pourrait être résolue par un examen comparatif de la gravité des blessures faites par les armes françaises et autrichiennes dans la dernière guerre, mais nous ne saurions dire si les chirurgiens de nos ambulances sont en mesure de donner une réponse précise à cet égard. La carabine française est une arme lourde, elle impose une fatigue plus grande au soldat, soit par elle-même, soit par le poids des cartouches ; mais avec l’augmentation de portée que lui a procurée récemment l’adoption des balles évidées, elle doit être redoutable à de plus grandes distances que toutes les autres armes portatives aujourd’hui connues, on peut même dire qu’elle a atteint la limite des portées utiles, celles où les bonnes vues peuvent distinguer un ennemi. Quant au fusil rayé, qui est entre les mains de toute l’infanterie, il a été un peu raccourci et allégé ; la cartouche qui lui est destinée