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même croire que c’est là le mobile qui l’a inspirée, et que s’il n’y avait eu en jeu que l’intérêt des actionnaires, quelque respectable qu’il fût, l’état aurait été moins pressé d’intervenir. Cela dit sur les motifs qui ont inspiré la loi du 11 juin 1859, il s’agit maintenant de l’apprécier au point de vue de la situation nouvelle qu’elle a faite aux compagnies.

D’abord, en ce qui concerne les actions, cette loi garantit, dans une certaine mesure, le capital social des compagnies engagé dans le réseau principal contre les mauvaises chances que peut lui faire courir l’exécution du réseau secondaire. Quelles que soient ces chances, le réseau secondaire ne dût-il donner aucun produit net, le réseau principal ne devra contribuer aux charges du réseau secondaire que pour la différence entre le taux de 4,65 garanti par l’état et celui auquel on aura emprunté, de telle sorte que si cette différence est, comme on l’a calculé dans le projet de loi, de 1,15 pour 100, le réseau principal devra contribuer pour 1,150,000 fr. par chaque centaine de millions dépensée pour le réseau secondaire, le reste étant couvert par la garantie de l’état. Et comme la construction de ce réseau a été évaluée largement dans le projet de loi, on peut juger dès à présent du maximum de perte que cette mauvaise chance peut faire courir à chaque ligne ; il suffit de prendre 1,15 pour 100 de l’évaluation des dépenses du nouveau réseau et de le soustraire du montant de revenu réservé de l’année 1857.

Pour la compagnie d’Orléans, dont le nouveau réseau, en y comprenant les concessions éventuelles, doit coûter 815 millions, à raison de 1,15 pour 100, le résultat de ce calcul donne 9,372,000 fr. à prélever sur le revenu réservé, soit 33 fr. 75 cent, sur un revenu qui a été de 90 francs en 1857 ; restent 56 francs 25 cent. — Le même calcul fait pour la compagnie de Paris-Méditerranée laisse à l’abri de tout prélèvement un revenu de 35 fr. par action. — Pour la compagnie du Nord, on obtient par action un revenu de 54 fr. : pour celle de l’Est, un revenu de 28 fr. ; pour celle de l’Ouest, un revenu de 26 fr. Les autres compagnies, n’ayant donné jusqu’ici que l’intérêt à 4 pour 100 du capital, ne peuvent figurer dans ce calcul.

Ainsi telle est à peu près la limite posée à la perte qui peut résulter pour chaque compagnie de l’influence du nouveau réseau. Sans doute il serait très fâcheux pour les actionnaires de la compagnie d’Orléans, qui toucheront cette année 97 fr. de dividende, de voir leurs revenus réduits à moins de 60 fr. ; pour les actionnaires de Lyon-Méditerranée, de ne plus toucher que 35 fr. au lieu de 53 ; pour ceux de l’Est, 28 au lieu de 40, etc. ; mais, qu’on le remarque bien, nous avons mis les choses au pis : nous avons supposé le réseau secondaire complètement improductif, ne donnant rien au-delà