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doit, sans perdre une heure de temps, amener le pape à l’un des trois partis suivans[1] : 1° une suspension d’armes pour donner le temps de consulter l’empereur et d’attendre sa réponse sur la proposition que le dataire Giberto avoit faite au vice-roi de rendre sa sainteté dépositaire des états de Milan ; 2° une trêve pendant laquelle chacun garderoit ce qu’il possédoit, et les forces que de part et d’autre on tiendroit sur pied seroient limitées ; 3° le dépôt immédiat entre les mains du pape de ce qui étoit occupé en Lombardie, soit par le roi de France, soit par le duc de Milan, avec l’établissement d’une trêve et la désignation du lieu et du moment où s’assembleroient les plénipotentiaires chargés de régler les stipulations de la paix. » Si le duc de Sessa n’obtenait aucun de ces trois points, le vice-roi, usant des pouvoirs dont il était investi, allait, dans l’excès de son découragement et de sa crainte, jusqu’à l’autoriser à céder le duché de Milan. Il demandait seulement que sur les revenus du duché on prélevât ce qui était dû à la garnison de Pavie, on donnât une pension annuelle au duc Francesco Sforza, et l’on détachât 50,000 ducats de rente pour le duc de Bourbon. Lannoy invitait le duc de Sessa à se hâter, parce que le temps lui faisait encore plus la guerre que l’ennemi, et il ajoutait : « Ce qui sera accordé entre le pape et le duc, que le duc me l’apprenne par un courrier qui vienne en volant, afin que je sache comment j’ai à me gouverner. »

Moins découragé que son vice-roi, Charles-Quint venait de lui écrire qu’il ne négligerait aucun sacrifice pour délivrer l’Italie, qu’il avait ordonné l’envoi d’une forte somme d’argent à son armée, que ses navires sur le littoral de la Méditerranée étaient prêts à transporter sept mille fantassins espagnols, qu’il faisait renforcer sa flotte à Gênes, qu’il cherchait à persuader au roi d’Angleterre d’attaquer la France du côté des Pays-Bas en joignant ses troupes à la cavalerie flamande. Cependant, comme les Anglais paraissaient enclins, depuis qu’ils avaient su l’entrée du roi de France dans Milan, à conclure une trêve jusqu’au mois de mai 1526, il autorisait le vice-roi de Naples à la conclure également, s’il le trouvait nécessaire, et il prescrivait au duc de Sessa de suivre les indications du vice-roi, sans attendre de nouveaux ordres[2]. Quelque temps après, l’empereur ayant appris l’accord que le pape, les Florentins et les Vénitiens, ses anciens alliés, avaient fait avec le roi de France, et l’aide en argent et en munitions que lui avait même donnée le duc de Ferrare, il s’en montra très courroucé. Il trouva que Clément VII, qui lui devait son élévation au pontificat[3], était imprudent

  1. Papiers de Simancas, ser. D., L. 3, n° 54.
  2. Lettre de Charles-Quint, du 11 décembre 1524. — Correspondance avec Adrien VI et le duc de Sessa, etc., p. 210 à 212.
  3. Lettre de Charles-Quint au duc de Sessa, du 9 février 1525 ibid., p. 212.