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III

Les Italiens le croyaient aussi. Ils regardaient François Ier comme prêt à ressaisir dans leur pays la prépondérance qu’il y avait exercée neuf années auparavant, après l’invasion de 1515 et la victoire de Marignan. Tous se tournaient vers lui avec les anciens empressemens. Le duc de Ferrare lui prêtait cinquante mille écus et lui envoyait cinquante chariots chargés de poudre et de boulets[1]. Les Vénitiens, qui avaient naguère quitté son alliance pour s’unir à Charles-Quint, sommés par le vice-roi de Naples de remplir les conditions de la ligue et de joindre leur armée aux troupes impériales, afin de soutenir en Lombardie le duc Francesco Sforza, à qui Charles-Quint envoyait l’investiture du duché de Milan, non-seulement ne se hâtaient pas de le faire, mais ils étaient en négociation avec François Ier[2]. Le pape Clément VII leur en avait donné l’exemple. Ayant sous sa main tout le centre de la péninsule, disposant des états de l’église comme souverain pontife, dirigeant la république de Florence comme chef de la maison de Médicis, Clément VII était recherché par les deux princes qui se disputaient l’Italie. Charles-Quint tâchait de le maintenir dans son alliance, François Ier n’oubliait rien pour l’amener à la sienne. Les tentatives qu’il avait faites, peu de temps après son élévation au pontificat, afin de rétablir entre eux un accord impossible, n’avaient eu aucun succès. Clément VII avait désapprouvé l’expédition de Provence. Avec une clairvoyance pénétrante, il avait prévu qu’elle échouerait, et il avait annoncé que l’invasion manquée de la France provoquerait une invasion nouvelle de l’Italie[3]. Lorsque. François Ier fut descendu dans les plaines de la Lombardie sans rencontrer devant lui d’autre obstacle que quelques villes où s’étaient retirés les restes de l’armée dissoute de l’empereur, Clément VII le considéra comme le maître certain du Milanais. Craignant sa puissance, il travailla à se concilier son amitié.

Il avait repris les négociations vainement entamées naguère pour rétablir la paix ou ménager une suspension d’armes entre les deux souverains. Au lieu d’en charger cette fois l’archevêque de Capoue, qui était plus porté pour l’empereur que pour le roi de France, il

  1. Le reçu sur parchemin des 50,000 écus d’or à la date du 26 novembre, signé par le roi lui-même, est dans le mss. n° 8569, anc. fonds franç. de la Bibl. imp., f. 89 et 90. — Le reçu de la poudre et des boulets est à la date du 9 décembre. Ibid. — Le duc de Ferrare prêta encore 25,000 écus d’or le 8 février 1525. Reçu signé de François Ier. Ibid.
  2. Lettre de Lannoy à Charles-Quint du 19 novembre. — Archives imp. et. roy. de Vienne.
  3. Lettre de l’évêque de Bath écrite de Rome au cardinal Wolsey le 12 juillet. — State Papers, t. VI, p. 322.