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elles les escaladèrent en laissant sur la route beaucoup d’hommes abattus par les coups d’arquebuse des assiégés ; mais, arrivées au sommet, elles trouvèrent la résistance la plus vigoureuse et la plus opiniâtre. Antonio de Leyva avait habilement placé ses lansquenets et ses Espagnols sous le comte de Lodron pour faire face à l’attaque du maréchal de La Palisse, et sous le comte de Hohenzollern pour soutenir celle qui s’exécutait du côté du roi. Il s’était transporté lui-même sur le point le plus menacé. Les assaillans, dont le feu de la place avait éclairci les rangs, furent reçus vers le haut des brèches à coups de pique. Après une heure d’impétueuse agression et de ferme résistance, ils se retirèrent, ayant perdu beaucoup de monde. François Ier voulut recommencer le lendemain. Il fit mettre à pied ses hommes d’armes, qui, couverts de leur cuirasse et formant la tête de la colonne, devaient ouvrir la marche et forcer la brèche. Tout était prêt pour un second assaut, mais ayant appris que par-delà les murailles se trouvaient des tranchées profondes et bien flanquées, et que des arquebusiers étaient postés dans les maisons crénelées du voisinage, il renonça à une nouvelle attaque qui aurait été plus meurtrière sans être plus heureuse[1].

Ne pouvant pas pénétrer dans Pavie par les côtés trop bien défendus de l’est et de l’ouest, François Ier espéra s’en rendre maître du côté du sud, où la ville, que protégeaient les eaux du Tessin, n’avait ni tours ni remparts. Il fallait pour cela détourner le bras principal du fleuve, afin de rendre accessible l’abord méridional de la place et de s’y jeter, en partant de l’île qu’occupaient le maréchal de Montmorency et Federico da Bozzolo. C’était une œuvre des plus hasardeuses. François Ier la tenta. Au-dessus de Pavie, il fit creuser un autre lit au Tessin pour lui donner un autre cours[2]. Pendant que les Français travaillaient à ouvrir au fleuve un nouveau passage et se disposaient à barrer l’ancien avec des arbres, des pierres et des terres, les assiégés ne furent pas sans crainte. Aussi Antonio de Leyva, qui avait fait diligemment remparer les brèches de la ville, fortifia de son mieux la partie maintenant menacée et jusque-là totalement dégarnie. Ces précautions toutefois ne furent pas nécessaires. D’abondantes pluies grossirent soudainement les eaux du Tessin, qui, devenu plus impétueux et rendu plus profond, emporta les machines des Français et détruisit leurs travaux. Il fallut renoncer à changer la direction du fleuve comme à donner l’assaut à la ville,

  1. Franciscus Tœgius raconte cette double attaque à la date du 8 novembre ; Voir aussi Du Bellay, p. 460, 461.— Lannoy écrit à Charles-Quint le 25 novembre : « Le mardi ensuivant donna l’assaut en deux ou trois lieux là où il perdit beaucoup de gens. Toutes espies disent que les François y perdirent deux mille cinq cents hommes. » — Archives imp. et roy. de Vienne.
  2. Du Bellay, p. 461, et Franciscus Tœgius à la date du 20 novembre.