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en Italie furent les grands desseins qu’il tenta par de petites manœuvres. S’il avait été plus hardi et moins artificieux, s’il s’était servi de la puissance dont il disposait, en sa double qualité de pape et de prince, avec la résolution entreprenante d’un Jules II, il aurait pu atteindre le but qui se déroba constamment à ses tortueuses recherches.

Très peu de temps après être monté sur le trône pontifical, Clément VII se détacha de ceux qui l’y avaient élevé et se rapprocha de ceux qui l’en avaient repoussé. Il le fit en usant d’artifice, sans rompre avec les uns et sans s’unir aux autres. Il ne sortit pas brusquement de la ligue que son prédécesseur Adrien avait conclue avec l’empereur, et dans laquelle étaient entrés les Vénitiens, les Florentins, les Siennois et les Lucquois ; mais il ne s’y maintint point. Le premier contingent pécuniaire envoyé, il se refusa à en fournir d’autres, prétendant que le trésor pontifical était vide, et que les états confédérés se trouvaient épuisés. Il ne consentit pas à renouveler la ligue, comme l’en pressait Beaurain, qui, du camp impérial, s’était rendu à Rome par l’ordre de son maître, afin de l’y décider. Il affecta la plus vive reconnaissance envers Charles-Quint, avoua que c’était avec son appui qu’il était arrivé à la dignité pontificale, et dit « que, si étant cardinal il avait été son serviteur, à cette heure comme pape il tenait les affaires de l’empereur pour les siennes[1]. » En même temps qu’il assurait à l’envoyé de Charles-Quint et au duc de Sessa, son ambassadeur, que les intérêts de l’empereur étaient les siens et qu’il n’avait pas de meilleur ami que lui, comme il le verrait bientôt à l’œuvre, il faisait des promesses formelles d’amitié à François Ier. Les représentans de ce prince à Rome, le comte de Carpy et l’ambassadeur Saint-Marsault, lui écrivaient : « Le saint-père assura, avec paroles encore plus formelles qu’auparavant, ne vouloir en sorte que ce soit favoriser vos ennemis, mais estre bon père universel, et rien moins votre ami que d’eux, et entendre travailler au bien de la paix[2]. » Il prétendit avoir refusé aux impériaux et aux Anglais l’argent qu’ils lui demandaient pour la continuation de la guerre en Italie, et d’un autre côté il fit savoir à Charles-Quint qu’il avait rejeté la proposition du roi de France, qui lui offrait de marier son second fils le duc d’Orléans, depuis Henri II, avec sa nièce Catherine de Médicis, en donnant aux

  1. Lettre d’Adrien de Croy (Beaurain) à Charles-Quint, du 28 février 1524. — Arch. imp. et roy. de Vienne.
  2. Dépêche du comte de Carpy et de Saint-Marsault à François Ier du 3 mars 1524. — Mss. Baluze, f. 52 : « Et aussy despuis, moi Carpy ay esté devers sa sainteté qui m’a dict et répliqué le semblable et qu’elle tiendra sa parole en cela tout autant que s’il s’en feust fait cinquante contrats. » — Ibid.