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confusion, les résultats humilians de projets si vastes et en peu de temps rendus si vains. La France, qui, à l’automne de 1523, devait être soulevée au centre et envahie par les extrémités, était partout paisible et sur tous les points délivrée avant la fin de l’année. Le grand rebelle sur lequel il avait compté pour susciter des embarras intérieurs à son rival François Ier était fugitif et impuissant. Quittant la Franche-Comté, comme il avait quitté le royaume, Bourbon s’acheminait assez tristement vers Gènes et allait demander en Espagne la sœur de Charles-Quint, condition de son inefficace alliance et prix convenu de son inutile révolte. Les lansquenets avaient regagné l’Allemagne à moitié débandés; les Flamands étaient rentrés en pillant dans les Pays-Bas ; les Anglais mécontens avaient été rappelés dans leur île par Henri VIII, plein de regret et d’aigreur; les Espagnols, réduits en nombre, avaient repassé les Pyrénées, après avoir paru un instant sur le territoire français sans y prendre une seule ville et sans y avancer d’un pas. Charles-Quint fut réduit à se justifier, auprès des ambassadeurs de son allié Henri VIII, de la faiblesse de ses efforts, et à leur expliquer l’inexécution involontaire d’une partie de ses engagemens. Il fallut convenir qu’il avait moins pu qu’il n’avait promis, et faire le pénible aveu des obstacles directs ou des résistances détournées qui, dans son royaume de Castille, s’opposaient à ses desseins ou arrêtaient ses volontés. Il se plaignit d’avoir été trompé par certains personnages dont il ne manquerait pas de se souvenir pour les châtier, lorsqu’il y verrait de l’opportunité[1]. Il ne commandait pas encore en maître à ceux qui l’avaient rendu victorieux à Villalar. Cependant il ne se découragea point. De Pampelune, où il s’était établi et où il avait transporté toute son artillerie, il faisait lever en Aragon des troupes qu’il croyait devoir être plus dociles, et il se préparait à entreprendre une campagne d’hiver. Il envoyait en même temps Beaurain à la rencontre du duc de Bourbon[2], pour le charger d’être son lieutenant-général en Italie et d’y représenter sa personne. La campagne n’était point terminée dans cette péninsule : l’armée française et l’armée impériale y étaient encore en présence et combattaient, la première pour reprendre, la seconde pour conserver le duché de Milan.


MIGNET.

  1. Dépêche du 12 novembre, écrite par Sampson et Jernigam à Henri VIII. — State Papers, t. VI, p. 192.
  2. Dépêche du 18 décembre, écrite de Pampelune par Sampson et Jernigam à Wolsey. State Papers, t. VI, p. 215.