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nale sont couvertes de tertres présentant la forme circulaire et conique, La circonférence de ces buttes artificielles, dues évidemment à l’industrie des hommes, varie à l’infini; elles ont ordinairement cent cinquante pas de tour. L’élévation est en rapport naturel avec la base; toutefois les effets du temps et du climat ont amené sur toute la périphérie des dénudations considérables. Le peuple appelle ces monumens moguiles, kurgans, mots russes qui signifient tombeaux ou tumuli. Il ignore l’origine de ces tertres et se borne à répondre qu’ils existaient avant l’entrée, l’arrivée; comme d’ailleurs la race actuelle n’est fixée dans ce pays que depuis un temps relativement très court, deux ou trois siècles au plus, on ne peut rien conclure de cette appellation. Les tumuli qui existent en France ou en Angleterre n’ont pas du tout la même apparence que les kurgans; les premiers sont moins dégradés au sommet, ils ont une forme plus conique. Les barrows anglais présentent, des différences aussi grandes, et il est impossible à un observateur d’admettre que cette multitude de kurgans soient des monumens funéraires. Il y a des endroits où l’on compte trente kurgans dans un kilomètre carré, et l’on aurait pu ensevelir une armée de deux cent mille hommes avec la terre qui a été remuée pour ces constructions.

Le climat de la Russie méridionale, qui est traversée parle 50e degré de latitude, est bien différent de celui de la France sur le même parallèle. On sait que les parties occidentales des continens jouissent toujours d’une température plus élevée que les parties orientales, et ce phénomène constant est particulièrement dû à l’effet des vents et au voisinage des mers. Ainsi les départemens du Nord et du Pas-de-Calais, dont le parallélisme est à peu près celui de l’Ukraine, n’éprouvent pas des abaissemens de température aussi prononcés que cette dernière province. Les vents du sud-ouest, qui prédominent en France, arrivent saturés de l’humidité toujours tempérée de l’Océan, et entretiennent en toute saison un état très favorable à la végétation. Dans la Russie méridionale, la transition de l’hiver à l’été est très brusque : le printemps et l’automne y sont pour ainsi dire supprimés; la végétation se développe soudainement dès la fin d’avril et ne s’arrête qu’à l’équinoxe d’automne. Après un été d’une sécheresse insupportable, la température subit en septembre un brusque revirement; le vent du nord-est souffle avec impétuosité ; le soleil ne perd pas son éclat, mais il semble perdre tout à coup sa chaleur. Quelquefois le mois d’octobre offre encore de belles journées; néanmoins, après cette première apparition de l’hiver, l’usage des fourrures devient nécessaire. Les plus grands abaissemens de température ont lieu dans les mois de janvier et de février, et le thermomètre descend quelquefois à 25 degrés au-des-