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LES COMMENTAIRES
D’UN SOLDAT

III.
LES DERNIERS JOURS DE LA GUERRE DE CRIMÉE.[1]

XI.

Le général Canrobert voulut reprendre dans l’armée le poste qu’il occupait au commencement de la campagne. Il alla rejoindre la division qu’il avait conduite à la bataille de l’Alma. Les brigades dont cette division se composait étaient commandées, l’une par le général Vinoy, l’autre par le général Espinasse, officiers intrépides, destinés à se retrouver encore dans cette campagne d’Italie où la mort attendait l’un d’eux. Les troupes que le général Canrobert allait conduire formaient alors un corps d’observation, campé sur les lisières de notre plateau, du côté de Balaclava. J’accompagnai dans son nouveau bivouac le chef que j’étais habitué à suivre, et près duquel j’eus le bonheur d’être maintenu. Ce bivouac était d’un aspect moins désolé que la plupart de ceux qui l’entouraient. En cet endroit un peu écarté, la terre avait quelques teintes verdoyantes. La vue était récréée par le spectacle de la vallée qui aboutit à Balaclava d’un côté, et de l’autre à la Tchernaïa. Ces lieux m’auraient charmé si un genre de préoccupation, nouveau pour moi, n’avait point fermé un instant mon cœur à ses jouissances les plus familières.

  1. Voyez la Revue du 15 janvier et du 1er février.