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pendance où sont certaines hallucinations de désordres particuliers du cerveau et du système nerveux.

Ces correspondances significatives expliquent les sympathies et rendent possible la production concomitante des mêmes idées chez des personnes d’organisation analogue, ou placées dans les mêmes conditions physiologiques. Si, comme l’a remarqué Adam Smith, la sympathie vient moins du spectacle de la passion que de la vue des circonstances qui l’excitent, à plus forte raison doit-elle naître d’un rapport dans les modifications de l’économie, d’une sorte d’harmonie préétablie entre deux tempéramens soumis à des influences physiques et psychologiques identiques, et l’on n’a pas besoin de recourir à une mystérieuse transmission des pensées pour expliquer comment la même image s’offre simultanément à deux imaginations ; mais on va plus loin. Au dire des expérimentateurs, j’entends parler des expérimentateurs sérieux, tels que le général Noizet et le docteur Puel, le magnétiseur peut suggérer au somnambule une opinion, une véritable idée délirante dont celui-ci demeure quelque temps dominé ; en un mot, il lui envoie un rêve à volonté. La vérification de ce phénomène est délicate, car il est toujours facile d’abuser le magnétiseur et deux hommes d’esprit, grands partisans du magnétisme animal, Deleuze et Puységur, paraissent avoir été plus d’une fois mystifiés de la sorte. Cependant, si le fait vient à être définitivement établi, nous ne devons voir encore là qu’une extension du phénomène auquel se rapportent les faits ci-dessus énoncés.

Ainsi que le remarque le général Noizet, il existe des personnes d’une organisation et d’une sensibilité telles qu’il suffit de leur rappeler fortement l’idée de certaines modifications de leur être pour que ces modifications se produisent en elles. C’est ce qui peut avoir lieu dans le somnambulisme, alors que les nerfs sont en proie à une incroyable surexcitation. J’ai cité plus haut l’exemple du bâillement. On sait que la seule idée de bâiller le provoque. Chez les hypocondriaques, les hystériques, on voit la douleur naître et le symptôme se manifester par la seule influence de la conviction que le mal existe. Les exemples de personnes persuadées qu’elles avaient telle ou telle affection morbide, et en présentant bientôt les symptômes, ne sont pas rares. Il a suffi de calmer leur esprit, de détourner leur attention, pour faire disparaître le mal. Si donc, comme l’avancent les observateurs que je viens de nommer, des paralysies imaginaires ont été provoquées chez des somnambules et même chez des personnes placées simplement sous l’empire d’une forte impression, ainsi que cela se passait dans le salon de l’abbé Faria, c’est que l’esprit réagissait assez sur le cerveau et le système nerveux pour y produire des sensations de même nature que celles qui seraient résultées d’une cause réellement morbide. Tout cela expliquerait com-