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intéressant tableau, à partir de la renaissance, dans son ouvrage De la Folie. Dernièrement, dans le nord de l’Irlande, une affection convulsive, accompagnée d’hallucinations, s’est déclarée avec des symptômes fort analogues à ceux qu’on a si souvent décrits. L’imagination frappée par des prédications fanatiques, de malheureuses jeunes filles sont tombées dans des accès de catalepsie qu’on a pris pour des extases surnaturelles et des communications de la Divinité. Au reste, il n’est personne qui n’ait constaté la même influence de l’exemple pour ce spasme nerveux qu’on nomme bâillement. Le somnambulisme naturel peut aussi prendre le caractère d’une contagion, car de récentes observations établissent l’étroite affinité de cet état avec l’hystérie et la catalepsie. Pezzi rapporte que son neveu fut saisi d’accès de somnambulisme à la suite de lectures prolongées sur cette bizarre affection, et bientôt après le domestique qu’il avait commis à sa garde en fut à son tour atteint.

Les rêves ou visions qui se manifestent durant les crises de presque toutes ces névropathies ne naissent certainement pas capricieusement. Ils sont dans un rapport étroit avec les sensations particulières de l’hystérique ou du somnambule, ils reflètent les préoccupations de son esprit et surtout les modifications qui s’opèrent dans son organisme. Suivant J. Braid et M. Azam, ils peuvent être provoqués, chez les hypnotisés dont les sens acquièrent une acuité singulière, par les mouvemens qu’on leur fait exécuter, ou même les idées qu’on leur suggère. J’ai eu plusieurs fois l’occasion d’observer qu’en répondant à une personne endormie et qui parle pendant son sommeil, on amène sa pensée sur des objets qui sont pour elle le sujet de nouveaux songes. Un fait analogue peut se produire chez les somnambules. Ainsi s’expliquerait le phénomène de la suggestion attesté par des personnes dignes de foi et ce que l’on a appelé communication de la pensée. L’attitude donnée aux somnambules engendrerait chez eux certaines visions qui se trouveraient dès lors en conformité avec l’idée du magnétiseur qui la leur a fait prendre. C’est assurément par un influx semblable de l’état physique sur le cerveau que l’on voit des ivrognes ou des personnes éthérisées avoir constamment dans leurs hallucinations les mêmes illusions, les mêmes préoccupations délirantes. On peut aussi rappeler cette maison de Tropea en Calabre dans laquelle fut caserne un régiment français, local bas et malsain où l’on rêvait généralement d’un chien noir, quand on y passait la nuit. L’influence physique et morale de cette habitation ramenait chez chaque dormeur le même état physiologique, partant le même songe. La folie paralytique est presque invariablement liée à des idées de grandeur et de richesse qui ont fait attribuer à la première phase de cette maladie le nom de monomanie ambitieuse. C’est là une preuve nouvelle de la dé-