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défense de la théologie naturelle plus de philosophie. S’il paraît peu connaître les maîtres de l’antiquité, il a lu avec fruit les principaux modernes, il est plein de Leibnitz et se montre familier avec Malebranche. Justement persuadé qu’on ne peut rien discuter ni rien établir touchant les vérités de cet ordre, si l’on n’a d’abord posé les fondemens et déterminé les procédés de la connaissance humaine, il commence par une psychologie médiocrement originale, mais sage et correcte, et qu’auraient approuvée Reid et Hamilton. Il établit surtout que la philosophie est loin d’être, comme l’ont prétendu par une singulière coalition les partisans d’un naturalisme empirique et ceux d’un surnaturalisme dogmatique, une école de variations et de discords, et que certaines conséquences des théories de Locke, de Berkeley ou de Kant, ne suffisent pas pour donner gain de cause au scepticisme. Locke, Berkeley et Kant lui-même ont leur part d’affirmation, et quoi qu’on pense de leurs objections contre certaines croyances du sens commun, les principes de la religion naturelle seront établis, s’ils le sont aussi bien que ces croyances mêmes, si l’existence de Dieu n’est pas plus douteuse que notre propre existence ou celle du monde extérieur. Or c’est à une certitude égale que M. Thompson entend amener les vérités dont il s’occupe. Il y réussit d’une manière que d’excellens esprits trouveront suffisante, en montrant que, bien qu’aucune preuve particulière ne soit de tout point parfaite, leur nombre et leur accord forment une évidence convaincante contre laquelle il ne s’élève que les difficultés communes à toute connaissance humaine. Point de savoir qui ne soit mêlé d’ignorance, point de connaissance où il n’y ait de l’inconnu. Comment donc n’y en aurait-il pas dans la connaissance de Dieu? On voit que M. Thompson, comme M. Buchanan, forme de toutes les preuves particulières une preuve multiple et concordante ; c’est ainsi que, sans affaiblir la certitude générale qui en résulte, il peut limiter la valeur de chaque argument isolé, et cette appréciation est faite avec autant de bonne foi que de sagacité.

Sûr de ce premier point d’appui, il se livre avec confiance à la recherche des attributs de Dieu, ou, comme il dit, il contemple dans la nature la manifestation du caractère divin. C’est alors qu’il voit éclater, avec la sagesse, la sainteté et la bonté de Dieu, et qu’il scrute ce que nous pouvons découvrir du plan de la création. Les grands problèmes de l’univers physique et du monde moral passent devant lui. Dans sa manière de les poser et de les résoudre ou de les éclaircir, on retrouve tout ce que la raison a pu concevoir jusqu’ici d’évident, de persuasif ou de plausible sur des problèmes comparables souvent à ceux que l’algèbre appelle indéterminés, parce qu’ils contiennent plus d’inconnues que d’équations. Le quatrième