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choix n’était pas possible. Son caractère à la fois plein de dignité et de bonté, son rare mérite comme forestier praticien, un jugement et un tact exquis, enfin les éminens services qu’il avait rendus dans les divers postes qu’il avait occupés le désignaient entre tous pour ce poste important. Inutile de dire qu’il sut justifier la confiance de l’administration. Grâce à lui, l’instruction forestière de l’école fut mise immédiatement au niveau de ce qu’elle était en Allemagne. Puissamment secondé dans son œuvre par M. Parade, aujourd’hui directeur de l’école et disciple lui-même du savant Cotta, il se consacra tout entier à l’enseignement et à la vulgarisation des doctrines dont il avait eu en Allemagne occasion d’apprécier la valeur. Déplorant, comme autrefois Buffon et Duhamel, la disparition de nos futaies, que l’ignorance et les besoins financiers avaient détruites, et convaincu que le taillis n’est qu’un système contre nature, rudimentaire dans ses procédés et incompatible avec une sylviculture perfectionnée, M. Lorentz devint le plus ardent défenseur des futaies. Il parvint, par une lutte incessante et après bien des efforts, à faire triompher et sanctionner par l’ordonnance réglementaire de 1827, en attendant qu’elle passe dans les faits, cette idée cependant si simple, que l’état n’est pas propriétaire de forêts au même titre qu’un particulier, qu’il a un but plus élevé à poursuivre que celui d’en obtenir le taux de placement le plus avantageux. Aidé de ses notes et de ses conseils, M. Parade publia le Cours élémentaire de Culture des bois, dont la première édition remonte à 1836. Cet ouvrage est à la fois si complet, si clair, si méthodique, que, pour le fond comme pour la forme, les Allemands n’ont rien qui puisse lui être comparé. Tandis qu’ils possèdent des traités de sylviculture sans nombre, nous n’avons guère que celui-là ; mais à quoi nous servirait-il d’en avoir d’autres, puisque, malgré sa forme élémentaire et son titre plus que modeste, il n’est aucune des questions les plus délicates de la science forestière qui n’y soit abordée et traitée avec l’autorité que donne le savoir uni à l’expérience, et que tout autre ouvrage ne pourrait guère que répéter, et répéter moins bien, ce qui se trouve dans celui-là ? C’est le privilège des maîtres de faire des œuvres entières qui n’ont besoin ni d’être commentées ni d’être complétées, et de rendre inutile, pour bien longtemps du moins, toute nouvelle tentative dans le même champ d’observations.


III

Nous avons cru devoir insister sur les phases diverses par lesquelles passa nécessairement la sylviculture avant de devenir ce