grands frais mis à l’épreuve, et dès qu’une ombre de succès couronnait des efforts coûteux, les résultats étaient proclamés très haut dans les rapports officiels et étalés avec ostentation dans des expositions publiques, soit à Paris, soit à Alger. Puis la culture privée était encouragée à imiter les efforts du gouvernement par des offres gratuites de semences et la promesse de primes considérables. Le comble de ces espérances et de ces efforts a porté principalement dans ces derniers temps sur le coton. Ce serait une telle bonne fortune que de ravir à l’Amérique le trésor à l’aide duquel elle tient l’Europe à sa discrétion, et force même à composition les hommes d’état anglais les plus rebelles, qu’on n’a pas cru pouvoir trop faire pour se l’assurer. Les mesures adoptées pour favoriser la culture du coton épuisent à peu près tout ce que l’imagination des gouvernemens, toujours très active en ce genre, a pu inventer en fait de protection artificielle. Tandis qu’une prime de 20,000 francs a été promise aux meilleurs produits, tous les cultivateurs de coton sans distinction recevaient l’assurance que le gouvernement achèterait leur récolte pendant cinq années à un prix rémunérateur, sauf à la vendre lui-même au Havre à ses risques et périls. « À ce compte, me disait un mauvais plaisant, on ferait pousser du vin sur les tours Notre-Dame sans se ruiner. » De plus judicieux efforts étaient faits en même temps pour tirer du sein des montagnes les richesses métallurgiques ou minérales très réelles qu’elles renferment, surtout dans la province de Constantine, et pour obtenir, par un reboisement systématique, une plus grande abondance des bois précieux qui y poussent naturellement, et que recherche déjà l’ébénisterie parisienne. Enfin la sollicitude du gouvernement voulant à tout prix faire de l’Algérie non-seulement un grand atelier de production commerciale, mais une grande voie de transit, beaucoup d’activité était déployée pour nouer des relations d’échange avec les populations intérieures de l’Afrique, et pour s’ouvrir ainsi les portes de ces profondeurs inconnues où n’ont pénétré jusqu’à présent que par des regards furtifs la curiosité de savans audacieux et la cupidité entreprenante du commerce anglais.
Ce serait une entreprise trop longue que de passer en revue, pour distribuer équitablement le blâme et l’éloge, cette série de mesures toutes conçues dans un même esprit. Quelques-unes ont été fort bien entendues et font en particulier beaucoup d’honneur à l’administration de M. le maréchal Randon ; d’autres portent au contraire à un haut degré l’empreinte d’une tendance funeste, mais bien commune chez les gouvernemens : la prétention de forcer la nature des choses ou d’en précipiter artificiellement le cours. Une seule remarque me dispensera d’entrer à cet égard dans un détail qui