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sacre a eu lieu au midi de Bornéo, dans le royaume de Banjermassin ; une cinquantaine de personnes, hommes, femmes, enfans, ont été victimes d’une recrudescence du fanatisme mahométan. Il y avait aussi des troubles toujours renaissans à Sumatra, à Célèbes. Une expédition avait été organisée pour réprimer ces agitations ; elle a été neutralisée par les maladies. Le gouvernement s’est hâté d’envoyer des renforts, sans négliger de scruter les causes de ce réveil du fanatisme mahométan aux Indes. On a cru voir une des causes de cette recrudescence dans le nombre toujours croissant des pèlerins qui font le voyage de La Mecque, et qui, à leur retour, mettent tout en œuvre pour fanatiser les masses. C’est ce qui a donné l’idée d’une ordonnance qui impose certaines conditions pour le voyage de La Mecque, et fait peser une certaine responsabilité sur ceux qui font ce pèlerinage. Ces faits, et des bruits évidemment exagérés sur l’état des esprits aux Indes, ont causé une certaine émotion dans le pays et ravivé la lutte au sujet de l’économie intérieure des possessions orientales et de la conduite des affaires dans ces régions. C’est maintenant une levée de boucliers du parti conservateur des Indes contre ce qu’il taxe d’application de principes par trop libéraux aux colonies. En même temps il s’acharne contre l’immixtion outrée du parlement dans les affaires coloniales. Le ministre, M. Rochussen, tout en observant une grande réserve, laisse percer son système, qui consiste à se garder tout à la fois des vues rétrogrades et des réformes hasardées. Le maintien de ce qui existe, c’est à quoi vise pour le moment sa politique ; plus tard, quand on saura le résultat de la nouvelle expédition partie, au mois d’octobre, de Java contre Boni (Célèbes), et quand on sera rassuré complètement sur la situation des Indes, il sera opportun de revenir sur bien des réformes, d’ouvrir de nouvelles discussions.

Quant aux affaires intérieures, la Hollande est tout entière aux questions de chemins de fer, qui depuis le mois d’octobre ont rempli les discussions des chambres. Le gouvernement a proposé un plan embrassant deux lignes, celle du midi, de Rotterdam au Mœrdyk, et la ligne du nord-est, ayant pour point de jonction la ville d’Arnhem. Ce projet a soulevé une vive opposition de la part de la ville d’Amsterdam, de plusieurs parties de la Frise, de la Gueldre, d’Utrecht, et de ce travail d’opposition est sorti un projet différent de celui du gouvernement, proposant de faire d’Utrecht le centre d’un réseau. Tout le monde avait assurément de bonnes raisons. Les opposans se plaignaient de voir la ville d’Amsterdam laissée de côté ; les partisans du gouvernement invoquaient surtout la nécessité de se mettre à l’œuvre et de commencer, pour arriver promptement à rejoindre la ligne belge du Mœrdyk. À ces questions de tracés venaient se joindre les divergences sur la construction par l’état ou par l’industrie privée. La loi, présentée par le gouvernement, discutée avec vivacité dans la seconde chambre, et votée à la majorité de quelques voix seulement, vient maintenant de subir l’épreuve d’un premier examen dans la première chambre ; on ignore encore le résultat de cette épreuve. Le pétitionnement d’ailleurs ne discontinue pas, et la question est devenue plus compliquée, en ce que le ministère, pour donner satisfaction aux vœux de la capitale, avait proposé en même temps le plan du percement des dunes, travail hardi qui ouvrirait au port d’Amster-