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Peñon de la Gomera et Ceuta, poste avancé en terre maure. Cette occasion a été une attaque nouvelle dirigée contre le territoire espagnol qui environne Ceuta par les tribus kabyles de l’Anghera. L’Espagne venait justement de signer avec le Maroc un traité assurant autant que possible la défense de la place de Melilla et la répression de la piraterie des Maures du Riff, lorsque les Kabyles de l’Anghera violaient le territoire de Ceuta, détruisaient un petit ouvrage avancé et abattaient les armes espagnoles placées à la frontière. Les armes de l’Espagne furent aussitôt relevées et désormais défendues par la garnison. Ceci se passait au mois d’août 1859. A partir de ce moment commençait toute une série d’escarmouches, d’hostilités entre les tribus marocaines et la garnison espagnole. C’est alors qu’on voit poindre l’idée de la guerre. Les préparatifs militaires faits à l’occasion des affaires d’Italie allaient trouver une destination. Le gouvernement de la reine Isabelle formait un corps d’observation à Algésiras, et en même temps le représentant de l’Espagne à Tanger, M. Blanco del Valle, recevait la mission de réclamer du Maroc des satisfactions et des garanties nouvelles de sécurité. On négociait donc appuyé sur les forces déjà peu à peu concentrées à Algésiras.

Négociation singulière, pleine de subterfuges évasifs et de réticences, où les prétentions de l’Espagne semblent grandir, se dévoilent pour mieux dire, à mesure que les dépêches se succèdent, et où les concessions, en apparence décisives, faites à l’origine par le Maroc diminuent d’importance à mesure qu’on les serre de plus près. M. Blanco del Valle demandait d’abord que les armes de l’Espagne fussent solennellement replacées là où elles avaient été abattues et saluées par les soldats du sultan marocain, que les coupables de l’insulte commise fussent exemplairement punis, que le droit de l’Espagne à élever des fortifications pour la défense du territoire de Ceuta fût reconnu, et que des mesures fussent adoptées en commun pour prévenir le renouvellement de ces actes d’agression. Le plénipotentiaire de l’empereur du Maroc à Tanger accédait à ces quatre demandes. Tout semblait terminé par le fait même de cette acceptation des conditions de l’Espagne ; rien n’était fini au contraire. D’abord l’empereur du Maroc mourait sûr ces entrefaites, et une solution définitive était nécessairement ajournée ; puis lorsque la négociation se renouait, M. Blanco del Valle en venait à préciser la nature des garanties réclamées par l’Espagne ; ces garanties consistaient dans la possession des hauteurs avancées qui assurent la défense de la ligne de Ceuta. Le plénipotentiaire marocain souscrivait encore à cette proposition, bien qu’il feignît de n’en pas saisir la portée. Quelles étaient en effet ces hauteurs avancées dont on parlait ?